Le Livre d'Argent

Elzen | @elzen@fadrienn.irlnc.org

4/16 Mais donc, de quoi s'agit-il ? Mendel, moine puis abbé de profession, était passionné par les sciences naturelles et plus particulièrement par la transmission des caractères. Il tentera ainsi de mettre en place quelques élevages de souris sur son temps libre, mais ce type de passe-temps ne plaisait pas tellement à son évêque.

Il se tournera alors vers la culture des pois, passe-temps un peu plus acceptable aux yeux de son entourage professionnel et religieux, mais qui lui permettait de réaliser environ le même genre d'expériences. C'est donc pour cette raison que ses travaux ont d'abord surtout intéressé les botanistes.
Photographie d'un plant de pois trouvé sur Wikimédia Commons. On y voit des tiges sur lesquelles poussent des feuilles et pendent des gousses, gousses qui contiennent les petites graines rondes que nous mangeons habituellement. En l'occurrence, toutes les parties végétales de cette image sont vertes, mais il existe des variétés avec des gousses (et donc des graines) de différentes couleurs. Je ne sais pas précisément quelle variété de pois cultivait Mendel, mais ça devait probablement ressembler à quelque chose comme ça.

3/16 Sauf qu'une trentaine d'années après la parution de ces travaux, après la mort de Mendel lui-même, trois scientifiques différents, nommés Hugo de Vries, Carl Erich Correns et Erich von Tschermak, parvinrent, indépendamment les uns des autres, à des conclusions assez proches. Et puisqu'il publièrent tous environ au même moment, il n'était pas évident de décider auquel des trois accorder la paternité de cette découverte.

C'est donc à cette occasion que, fouillant dans les archives, on retrouva les publications de Mendel dont les conclusions étaient très similaires. Et que les trois scientifiques acceptèrent de lui laisser la paternité, évitant ainsi quelques casses-têtes inutiles. C'est donc principalement par un concours de circonstances que ce dont nous allons parler est désigné aujourd'hui comme les « lois de Mendel ».

Au passage, le fait que plusieurs scientifiques arrivent indépendamment aux mêmes conclusions, c'est toujours intéressant, mais ça je l'avais déjà évoqué dans le thread sur Darwin : https://fadrienn.irlnc.org/notice/AybcCRXAswcqPg6ZLE

2/16 Il faut dire que Gregor Mendel était, de son vivant, beaucoup moins connu que son contemporain Charles Darwin, qui avait déjà une certaine notoriété depuis la parution des notes de son voyage à bord du Beagle, avant que l'Origine des espèces ne révolutionne toute la biologie de son époque, ou que Carl von Linné, qui les précédait tout deux d'un siècle, et dont le Systema Naturæ a été l'ouvrage de référence pour un grand nombre de biologistes.

En fait, au moment de la parution des travaux de Mendel, seuls les botanistes s'y sont intéressés. Et certains d'entre eux n'étaient même pas spécialement convaincus par ses résultats, pointant quelques failles dans sa façon de faire. Pas vraiment l'archétype du scientifique révolutionnaire qui marquera son époque et les suivantes, donc.

Ah, oui, je suppose que tout le monde a entendu parler de Darwin, mais si c'est la première fois que vous lisez le nom de Linné, vous avez loupé ce thread-ci : https://fadrienn.irlnc.org/notice/Ayq6HnZA7DBl1vwY2S

Alors, il paraît qu'on est de nouveau vendredi. Franchement, le calendrier n'est pas très original, hein, on aurait presque l'impression que ça arrive toutes les semaines, et en plus au même moment. M'enfin bon, du coup, on va en profiter pour vulgariser encore un peu, et ça va nous faire un beau #Vulgadredi de seize pouets, c'est un format qui marche bien.

Et pour ce nouveau #VendrediVulga, donc, on va continuer de parler biologie. On reviendra sur l'astronomie bientôt, il faut toujours que je vous parle d'héliocentrisme, mais avant ça, il nous reste quelques trucs à évoquer ici. En effet, on a d'abord parlé de Darwin (et Wallace !) et de sélection naturelle, puis de Linné et de classification, mais pas encore d'hérédité, ni donc de Gregor Mendel.
Capture d'écran du film de Disney « Le Roi Lion », dans laquelle on voit Mufasa, un lion adulte, et son fils Simba, un lionceau, de dos, en train d'admirer un coucher de soleil visible dans le lointain. Le film, bien qu'évoquant le « cycle de la vie », ne parle pas directement de ce dont il va être question dans ce thread ; mais on peut quand même noter que Simba, en grandissant, ressemble beaucoup plus à son père qu'à son oncle Scar, l'antagoniste principal du film. Pour les illustrations, je fais ce que je peux.

Vous voulez lire de l'imaginaire (SF, fantasy, horreur, fantastique) maiiiiis vous aimez pas trop trop financer des milliardaires problématiques qui soutiennent l'extrême-droite ? Quelques bonnes pratiques avec une idée nette de "qui possède quoi" dans l'édition (autant que possible, hein).

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@Projet_Arcadie En nombre de premiers ministres différents, ça fait pas mal.

@orange_lux @a_dron Sur la question « présenté comme une bonne chose », je trouve que le cycle des robots d'Asimov est justement assez ambigu. Il joue pas mal sur le fait que les trois lois ne couvrent pas tout et que ça ouvre la porte à des trucs qui me semblent présentés comme étant inquiétants.

La dernière nouvelle du premier recueil, par exemple, se termine par des machines qui, par la manipulation, prennent le contrôle de l'humanité (et font perdre leur job à des gens qui pourraient remettre ça en cause, notamment) parce qu'elles estiment qu'elles décident mieux que nous et que donc pour notre bien il faut qu'on reste sous leur contrôle. Susan Calvin a l'air plutôt enthousiaste, mais je ne suis pas sûr qu'on soit censés être d'accord.

(Bon, après, dans une nouvelle ultérieure du cycle il est dit que ces machines ont fini par se saborder elles-mêmes pour notre bien, mais je crois qu'il n'a jamais vraiment détaillé ce point.)

Nous avons tous pleuré Samuel Paty et Dominique Bernard, aujourd’hui encore, dans les écoles, les collèges, les cours de récré soudain silencieuses. L’Éducation nationale a su reconnaître ces crimes, désigner les coupables, s’ériger en victime.

Mais Caroline Grandjean, comme Christine Renon avant elle, s’est suicidée dans un silence assourdissant. Parce que là, il n’y a pas d’ennemi commode, pas d’assassin extérieur. Là, c’est l’institution elle-même, celle qui broie, écrase, exige jusqu’à l’épuisement.

Elle sait pleurer les crimes des autres, jamais les siens.
Reconnaître ces morts-là, ce serait admettre qu’elle tue aussi.

Nous sommes de nouveau vendredi, il est de nouveau l'heure de vulgariser, alors repartons pour un nouveau #VendrediVulga. Et pour cette troisième édition biologique du #Vulgadredi, après avoir parlé de l'origine de l'Origine des espèces et montré comment on range les espèces au seins de groupes plus gros (d'ailleurs, je réalise que j'ai oublié de vous donner le terme générique : si vous voulez parler d'un(e) genre/famille/ordre/etc. sans préciser à quel niveau, on utilise pour ça le mot « taxon »), on va maintenant parler du problème que pose la notion-même d'« espèce ».

Parce que oui, de base, la notion d'espèce, c'est surtout quelque chose qu'ont utilisé Aristote, puis Linné, pour essayer de classer le vivant… sauf qu'Aristote et Linné étaient tous les deux convaincus que les formes de vie restaient globalement inchangées au fil du temps. Vu qu'on sait maintenant que ce n'est pas le cas, évidemment, continuer à utiliser une notion fixiste peut nous poser quelques soucis. On va donc détailler ça en seize pouets (tiens, ça pourrait devenir une habitude).

Mais avant, comme ça pourrait aidé d'avoir jeté un œil au thread de la semaine dernière, le voici : https://fadrienn.irlnc.org/notice/Ayq6HnZA7DBl1vwY2S

Allez, tout est prêt pour la #FêteDeLaScience #FDS2025 à #Lannion jour 2 !

Je vous attends aux Ursulines, et mon collègue au Planétarium, pour parler des conditions d'habitabilité des planètes, des endroits où on a découvert des exoplanètes dans la galaxie, des conditions pratiques avec lesquelles on (ne) pourrait (pas) communiquer avec d'éventuels extraterrestres, et de ce que la biodiversité terrestre a à nous apprendre là-dessus. N'hésitez pas à passer nous voir :-)

@Looping D'après @malauss, passer le budget par ordonnance ne se fait que si le retard est imputable au parlement. Donc ce qui jouera à ce niveau sera le nombre d'amendements déposés pour faire durer les débats plus que la date à laquelle le budget est proposé.

(Effectivement, l'article 47 donne bien ce délai de 70 jours, mais tout est relatif à la date de dépôt, une date butoir comme le 31 décembre n'a pas l'air mentionnée.)

@Khrys C'est marrant, il y a des trucs qui ne me manquent pas *du tout* de l'époque où j'étais prof.

Courage !

En direct de la #FêteDeLaScience #FDS2025, et visiblement je n'ai pas trop mal réussi mon coup dans la préparation de l'animation puisque ça fait plusieurs fois que les gens me posent des questions pile sur le prochain truc dont j'ai prévu de parler.

Bon, ce soir, vous aurez la fondation de Thèbes (une de mes légendes préférées, parce que c'est transmis par ❤️ Ovide❤️

16/16 Donc, voilà, ce n'est pas pour autant qu'il faut abandonner complètement cette notion d'espèces, ça reste pratique et pas trop trop faux dans pas mal de cas, mais il faut garder en tête qu'il y a un certain décalage entre notre façon d'appréhender le monde et la réalité du monde en question. Et que c'est généralement assez fascinant, d'ailleurs.

Ceci étant dit, pour les gens parmi vous qui seront sur #Lannion ce week-end, n'hésitez pas à passer aux Ursulines, j'y serai tout l'après-midi demain et dimanche (et lundi toute la journée, mais c'est seulement pour les scolaires) sur le stand du Planétarium pour la #FêteDeLaScience, pour parler de ce à quoi on peut s'attendre question vie extraterrestre. #FDS2025
Vue d'artiste d'une exoplanète ressemblant à la Terre, trouvée sur Wikimédia commons. On voit, sur fond de ciel étoilé où l'étoile autour de laquelle tourne cette planète est clairement identifiable en bas à gauche car beaucoup plus lumineuse que celles de l'arrière-plan, une grosse boule dont l'atmosphère a des reflets bleutés, dont on voit beaucoup de sol, mais aussi quelques étendues liquides, et aussi des nuages. Une bonne partie de ce que j'ai préparé pour la fête de la science concerne en effet les exoplanètes potentiellement habitables, dont j'ai déjà parlé dans quelques threads ici.

15/16 Comme pas mal d'autres choses, donc, la notion d'« espèce » est une notion pratique qu'on utilise pour satisfaire notre besoin de ranger les objets dans des tiroirs séparés, mais en vrai, dès qu'on essaye d'aller voir dans le détail, c'est difficile de trouver une définition qui marche vraiment dans tous les cas.

Comme j'en parlais dans ma vidéo sur les mécanismes de l'évolution, la biologie a ceci de particulier par rapport aux autres domaines où la théorie de l'évolution peut s'appliquer que le mécanisme de reproduction lui-même peut y évoluer avec le temps, ce qui, forcément, rend le bazar encore plus bazardesque.

Je vous ai déjà donné le lien plusieurs fois, mais bon, si jamais, la vidéo est là : https://skeptikon.fr/videos/watch/20f8140e-2197-41ae-b033-86fc69b059f9

14/16 Mécaniquement, donc, chaque reproduction bactérienne est une séparation irrémédiable entre deux branches de l'arbre du vivant. Bon, on pourrait considérer que cette division se fait principalement à l'identique, et que deux individus rigoureusement identiques peuvent être comptés au sein d'une même espèce, malgré tout. Mais là encore, les mutations apparaissent graduellement au fil des générations, nous faisant nous poser la question d'à quel endroit placer la limite.

Et ça devient encore plus complexe quand on se rend compte que certaines bactéries sont capables de modifier leur code génétique au cours de leur vie, sans avoir besoin de se reproduire pour ça, à partir de molécules d'ADN trouvées dans leur environnement ou échangé, via leurs pilus, avec d'autres bactéries, possiblement de souches très différentes. Difficile, donc, de définir une notion d'« espèce » qui tienne vraiment la route dans ces conditions.
Photo prise au microscope (et beaucoup moins colorée que la précédente) où l'on voit deux bactéries Escherichia coli déployer les pilus qui leur permettent d'échanger leur matériel génétique. L'échelle est indiquée en bas à droite, nous montrant que ces bactéries mesurent (à vue de nez) environ trois micromètres de long.

13/16 Mais les animaux et les végétaux, disais-je avant d'être interrompu par moi-même, ont en commun d'avoir principalement une reproduction sexuée, où pour fabriquer un nouvel individu, il faut croiser le matériel génétique de deux autres individus. Évidemment, ça facilite le fait de définir une espèce par l'interfécondité. Ce n'est pourtant pas le cas de tous les êtres vivants !

Les bactéries, ces êtres unicellulaires qui forment l'un des trois grands domaines du monde vivant, se reproduisent par division cellulaire, comme le font les cellules de notre organisme (l'image d'illustration ne présente d'ailleurs pas des bactéries, lisez l'alt-text). C'est-à-dire qu'une bactérie, seule, va copier tout son matériel interne, notamment le matériel génétique, puis se séparer en deux. Elle se multiplie en se divisant, faisant par là un pied de nez aux mathématiques.
Photographie prise au microscope de l'embryon d'un oursin trouvée sur la page Wikipédia consacrée à la mitose (division cellulaire). Je voulais initialement montrer ici une image de bactérie, mais cette image-ci est beaucoup plus parlante : on y voit tout un groupe de cellules à différentes phases de cette reproduction, certaines ayant à peine commencé à copier leur matériel génétique et d'autres en étant déjà à l'étape où la séparation commence à se faire.

12/16 Mais les animaux et les végétaux ont en commun d'avoir une reproduction sexuée, où pour fabriquer un nouvel individu, il faut croiser le matériel génétique de deux autres individus. Enfin, plus ou moins, parce que ça aussi ça peut être plus compliqué que ça : dans certaines espèces, les femelles peuvent aussi se reproduire par parthénogenèse, sans l'intervention d'un mâle.

Et on peut d'ailleurs aussi noter que cette distinction entre mâles et femelles à la fois chez les plantes et les animaux est un exemple de convergence évolutive : les champignons, qui sont évolutivement plus proche des animaux qu'eux ou les animaux de le sont des plantes, pratiquent une reproduction sexuée aussi, mais avec un nombre de « types sexuels » sacrément plus grand que juste deux.

Et même chez les animaux, y a des cas assez particuliers, par exemple celui que nous présentait @adelinedurandm il y a quelques semaines : https://oc.todon.fr/@adelinedurandm/115220424053383030

11/16 Ce phénomène de « spéciation par hybridation » a longtemps semblé assez improbable, mais l'essor des analyses génétiques depuis les années 1990 semble avoir montré qu'il était en fait relativement courant chez les végétaux, et pouvait même survenir, même si beaucoup moins souvent, chez les animaux. Bon, la plupart des cas recensés chez les animaux sont des papillons, mais ça a pu arriver aussi, de façon exceptionnelle, chez des vertébrés.

Ce n'est toujours pas ce qui va nous faire arriver des griffons, chimères et autres mélanges improbables de la mythologie dans notre vrai monde, comme j'en parlais la semaine dernière, mais ça nous rappelle au moins que la biologie peut parfois être beaucoup plus créative que notre imagination.

Même si notre imagination se défend bien aussi, surtout sous les crayons de @davidrevoy : https://framapiaf.org/@davidrevoy/115339677157607542

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