Le Livre d'Argent

Elzen | @elzen@fadrienn.irlnc.org

@stephanedevannes Si on arrivait à identifier sur Terre des signes d'une visite extraterrestre, ça soulèverait sans doute plus de questions que ça n'en résout, en tout cas. C'est une des raisons pour lesquelles, suivant le principe de parcimonie, c'est rarement une hypothèse à privilégier.

En pratique, on a quand même assez peu de raisons de penser que ça pourrait être le cas, il y a tout un tas d'explications beaucoup plus convaincantes pour la quasi-totalité des phénomènes rapportés.

(Après, on sait déjà que notre connaissance actuelle de l'univers est très vraisemblablement en partie erronée. Mais jusque là, quand on arrive à identifier et corriger ces erreurs, ce n'est pas ce chemin-là que ça prend.)

@lienrag La vitesse de la lumière est une vitesse limite en effet. Cependant :

– Il n'y a pas que la lumière qui aille à cette vitesse, les neutrinos aussi, par exemple,

– Il faut aussi compter avec l'expansion de l'univers, qui fait que certaines galaxies peuvent apparaître localement comme s'éloignant plus rapidement que la lumière (même si leur vitesse réelle de déplacement est inférieure).

Mais ça demanderait d'entrer pas mal plus dans les détails, d'où mon « à peu près » pour résumer.

@lienrag Aucune idée de ce qui pourrait techniquement être mis au point par une espèce évoluant entièrement sous l'eau (pas vraiment mon domaine ^^"). Une bonne partie des êtres vivants dans nos océans à nous (pas tous cependant) ont une certaine tendance à ne pas avoir de bras, ça doit limiter un peu.

La question de savoir comment tu peux techniquement concevoir quelque chose qui va dans l'espace quand creuser un trou dans le plafond de glace au dessus de toi est susceptible de dépressuriser l'espace qui t'environne (et de comment tu as l'idée de faire ça à la base) doit jouer aussi.

Mais dans tous les cas, c'est de la spéculation sans données, donc pas ce qu'on fait de plus solide.

@lienrag Je commente l'« équation » telle qu'elle a été formulée par Drake. À l'époque, on ne savait pas encore pour les océans sous la surface, donc ça n'a pas dû lui traverser l'esprit (cf la remarque précédente : ç'pas une équation, c'est la liste des critères qui lui sont venus à l'esprit, pour s'interroger sur à quel point ils sont sélectifs).

Ceci dit, quand même deux choses : d'une part on est pour l'heure totalement incapables de détecter des lunes autour d'exoplanètes (tiens, d'ailleurs, je causerai peut-être des techniques de détection une prochaine fois, j'ai plusieurs fois tourné autour du sujet sans y entrer, ça mériterait), donc bon, l'intérêt de spéculer sans données est faible. Et dans l'absolu, que la vie soit sur une lune ou sur une planète, ça revient un peu au même dans l'affaire.

D'autre part, si on veut donner davantage de poids à la probabilité d'une vie sur un objet de type Europe/Ganymède, avec un océan piégé sous la glace, alors ça devrait aussi rendre plus sélectif le filtre de la capacité à communiquer, donc le résultat final devrait assez peu varier (puisque l'idée est d'évaluer un nombre de civilisations avec lesquelles on pourrait entrer en contact).

25/25 Donc voilà, l'équation de Drake est célèbre, mais pas forcément si intéressante que ça, d'autant qu'elle date d'une époque où nos connaissances sur l'univers, étaient nettement moins avancées qu'elles ne le sont aujourd'hui. Néanmoins, même s'il est peu probable d'arriver à communiquer avec des extra-terrestres, je vais quand même conclure par la remarque de Carl Sagan : « Si nous étions seuls dans l'univers, ce serait un beau gâchis d'espace. »

Sinon, mon thread de la semaine dernière semble avoir bien plu, donc merci à vous, j'espère que celui-ci vous plaira aussi :-) Je vais par contre peut-être essayer de faire un peu plus léger pour les prochains, parce que là j'ai mis une bonne partie de la semaine à bosser dessus. Mais on verra. D'ailleurs, si vous avez des idées ou des questions, n'hésitez pas !
Et pour conclure ce thread, la célèbre image du film E.T. où l'on voit le vélo voler avec une lune un peu trop gigantesque derrière lui.

24/25 Pour autant, même si mon estimation personnelle de ces différents facteurs me conduit à considérer comme très peu vraisemblable qu'on détecte une forme de vie intelligente autour de nous, je ne veux pas jeter la pierre au projet SETI dans son ensemble, qui a quand même amené pas mal de choses intéressantes.

En particulier, c'est d'abord pour les besoins d'analyse de ce projet qu'a été conçu un très chouette outil, BOINC, qui vous permet d'offrir une partie de la puissance de calcul de votre ordinateur pour faire progresser la recherche scientifique. Juste, je vous conseillerais personnellement de choisir plutôt des projets autour de la médecine ou du climat, mais il y en a plein de disponibles, donc n'hésitez pas à aller voir ça d'un peu plus près.

En commençant par là, par exemple : https://fr.wikipedia.org/wiki/Berkeley_Open_Infrastructure_for_Network_Computing

23/25 On estime qu'avec nos moyens actuels, on pourrait détecter des signaux artificiels s'ils étaient émis dans les cent cinquante années-lumière autour de nous. C'est déjà pas mal, mais c'est quand même beaucoup moins que notre galaxie prise dans son ensemble : seulement huit ou neuf mille étoiles, et une bonne partie des exoplanètes connues sont plus loin que ça.

J'ai un peu plus de mal à trouver une liste par distance des nébuleuses où se forment les étoiles, mais elles sont globalement pas mal loin aussi (la grande nébuleuse d'Orion est par exemple à environ 1 300 années-lumière de nous, et celle de l'aigle, où se situent les piliers de la création, à environ 7 000). Donc, si on veut en revenir aux paramètres de l'équation de Drake, le nombre d'étoiles qui se forment par an dans ce voisinage de 150 années-lumière autour de nous est environ de zéro, ce qui limite un peu le résultat de l'équation.
Plan de la Voie lactée : il s'agit de la représentation d'une galaxie spirale avec de multiples indications de position d'objets célestes connus (indiqués par un indicatif de catalogue, M pour celui de Messier et NGC pour le New General Catalogue, suivis par le numéro de l'objet dans ce catalogue). Tous ces objets ne sont pas des nébuleuses, mais, d'après l'échelle fournie, aucun des objets indiqués ici n'est à moins d'un millier d'années lumière de nous.

22/25 Sans compter le fait que, si on mise sur une vie avec laquelle on pourrait communiquer, la durée de cette communication est à prendre en compte. Mettons qu'on détecte une civilisation à cent années-lumière d'ici : on leur envoie un message, iels ne le reçoivent que dans un siècle. Il faut ensuite autant de temps pour recevoir leur réponse. Ça fait peut-être un peu lent pour espérer tenir une conversation.

Détecter de la vie sur une autre planète serait une très chouette nouvelle. Mais il faut sans doute se mettre en tête que c'est à peu près tout ce qu'on pourrait faire : la détecter, et peut-être vaguement regarder de très loin (et avec beaucoup de latence) ce qui se passe. L'univers est trop grand autour de nous pour espérer pouvoir interagir.
Célèbre planche du WebComic The Oatmeal. Dans la première case, deux personnes marchent l'une à côté de l'autre et la première demande (en anglais) « Oracle, sommes-nous seuls dans l'univers ? ». Dans la seconde case, vue de beaucoup plus loin pour qu'on puisse observer un bout de ciel et le fait que ces deux personnages sont assez isolés, l'oracle répond « Oui. » Dans la case suivante, la première personne insiste, surprise, « Donc, il n'y a pas d'autre vie ailleurs ? » La case suivante nous montre un gros plan sur l'oracle qui répond « Il y en a. » Puis la dernière case est de nouveau vue de loin, montrant le ciel étoilé et l'oracle qui précise « Ils sont seuls aussi. »

21/25 Nos télescopes nous permettent de voir plus loin que nos seuls yeux, évidemment, mais plus on s'éloigne, plus on perd le détail des informations qu'on reçoit. Et eux mêmes ont une portée limitée : sur les cent mille années-lumière de diamètre de notre galaxie, une bonne partie nous est simplement inaccessible.

L'argument global derrière l'équation de Drake est de dire que, vu que notre galaxie est énorme (elle compte plus de deux cent milliards d'étoiles, c'est quand même pas mal), alors il y a forcément de la vie ailleurs, et probablement aussi de la vie intelligente. Et ça se tient. Mais ça néglige quand même de souligner qu'elle a de bonnes chances d'être trop loin pour qu'on puisse la détecter.
Représentation de notre galaxie, la Voie lactée, vue depuis l'extérieur (il s'agit d'une reconstitution, envoyer un robot à cette distance pour prendre une vraie photo demanderait quelques millions d'années de voyage). La position (approximative) du soleil est indiquée par une croix accompagnée d'une mention « vous êtes ici » dans l'un des bras spiraux, à un peu plus de mi-chemin (26 000 années-lumière environ) du centre.

20/25 Et, bien sûr, cette durée/distance varie pas mal d'une étoile à l'autre. Dans la salle du planétarium, je compare en ce moment souvent deux d'entre elles : Véga, l'étoile principale de la Lyre, est à 25 années-lumière de nous. Ce qui signifie que d'éventuels extraterrestres qui nous observeraient depuis là-bas nous verraient en ce moment en train de finir de fêter l'an 2 000.

Ça vous paraît beaucoup ? « Pas très loin » dans notre ciel se trouve Déneb, l'étoile principale du Cygne, qui elle se situe à… 1 600 années-lumière de nous. Des extraterrestres qui nous observeraient depuis là-bas verraient eux encore la fin de l'antiquité. Et ce sont pourtant deux étoiles visibles à l'œil nu, donc relativement proche, quand la plus grande partie de notre galaxie est trop loin pour être visible.
Capture d'écran de Stellarium montrant le triangle d'été, formé par les trois étoiles les plus brillantes du ciel à cette saison : Altaïr, dans la constellation de l'Aigle, Véga, dans celle de la Lyre, et Déneb, dans celle du Cygne. Les noms des trois étoiles sont indiqués, mais aucune constellation n'est tracée.

19/25 D'autant qu'il y a encore un autre point sur lequel le temps joue un rôle assez essentiel : celui de la durée nécessaire à ce que l'information puisse se propager jusqu'à nous. En effet, que ce soit pour capter des communications ou pour tenter d'identifier des traces de vie sur une exoplanètes, notre intermédiaire est le même : la lumière (au sens large, incluant les ondes radios). Et la lumière a une vitesse limitée.

Elle est, certes, très rapide, plus rapide qu'à peu près tout le reste dans l'univers, avec ses 299 792 458 mètres (ou, en arrondissant, 300 000 kilomètres) par seconde. Mais les distances qui nous séparent des étoiles sont simplement astronomiques, faisant que même la lumière a besoin d'un bon paquet d'années pour faire le trajet.
Image illustrant la page Wikipédia sur la vitesse de la lumière. On voit, sur fond de ciel étoilé, la Terre sur son orbite autour du Soleil, qui est visible au loin (la Lune est également présente sur l'image). La distance (moyenne) de cent cinquante millions de kilomètres entre notre planète et son étoile est mentionnée ; la lumière ayant déjà besoin de plus de huit minutes pour parcourir une telle distance.

18/25 Pour reprendre le même caractère comme exemple, notre pouce opposable est caractéristique du groupe des primates, qui fait son apparition il y a un peu moins de soixante millions d'années, donc après le célèbre impact d'un astéroïde ou d'une comète ayant entraîné la disparition des dinosaures non-aviens (dont il faudra d'ailleurs peut-être aussi que je cause un jour). Et donc au sein de ce groupe, notre espèce n'est âgée que de quelques centaines de milliers d'années.

L'évolution étant due à l'accumulation de mutations apparues par hasard (un hasard par ailleurs stabilisé par la sélection naturelle), il est encore une fois très incertain d'extrapoler, à partir de notre seul exemple, le temps qu'il faut pour qu'une espèce capable de communiquer apparaisse. Et donc de se limiter au nombre d'apparitions d'étoiles et à la durée de vie d'une civilisation pour mesurer l'intervention du temps dans l'affaire.
Capture d'écran de l'excellent documentaire Espèces d'espèces. On y voit un grand nombre de caractères évolutifs qui composent notre corps (pouce opposable, œil, poil, etc.) se répartir sur une frise chronologique, montrant combien de millions d'années se sont écoulés depuis que nous les avons acquis.

17/25 Mais c'est encore pire quand on considère que l'histoire ne commence pas avec notre espèce : il a d'abord fallu que les hasards de l'évolution fassent apparaître une espèce dotées des capacités cérébrales requises pour ça, mais aussi de quelques autres éléments indispensables (par exemple la capacité à manier efficacement des outils, grâce au pouce opposable sur notre main).

La vie est apparue sur Terre il y a plus de trois milliards et demi d'années, peut-être même plus de quatre. Si on a pu en relever des traces fossiles, ce n'était en revanche à l'époque que des formes de vie microbiennes. J'en parlais rapidement la semaine dernière, les grandes lignées animales et végétales actuelles n'ont commencé à se diversifier qu'il y a cinq à six cent millions d'années, soient beaucoup plus tard, à une époque qu'on appelle le Cambrien.

D'ailleurs, si ça vous intéresse, lisez ça, c'est assez passionnant : https://fr.wikipedia.org/wiki/Explosion_cambrienne

16/25 Combien de temps a-t-il fallu à la vie terrestre pour être en mesure de communiquer ? On a déjà dit que l'espèce humaine apparaît il y a environ 300 000 ans, et ne commence à émettre qu'il y a moins d'un siècle. Est-ce que cela aurait pu prendre un temps complètement différent ? Sans doute, puisque cela dépend beaucoup des aléas de l'Histoire.

À titre d'exemple, j'ai parlé plus haut de l'invention de l'agriculture dans le « croissant fertile » il y a environ onze mille ans, en précisant que c'était « la plus ancienne ». En effet, il y a eu plusieurs inventions de l'agriculture, indépendantes les unes des autres, à différents coins de la planètes, avec quelques milliers d'années de décalage entre elles. Ce qui fait déjà une incertitude pas négligeable sur le temps dont on peut avoir besoin avant de construire des radiotélescopes.
Carte montrant les différents foyers d'émergence de l'agriculture et la façon dont elle s'est répandue à l'ensemble de la planète. L'agriculture européenne hérite de celle apparue dans le croissant fertile (proche et moyen-orient actuels) il y a onze mille ans, mais d'autres foyers sont apparus en Chine il y a neuf mille ans, en nouvelle guinée il y a entre neuf et six mille ans, probablement en Afrique il y a cinq à quatre mille ans, et sur le continent américain, où on compte un foyer au sud-ouest (cinq à quatre mille ans), un dans l'actuel Mexique (cinq à quatre mille ans) et un au nord-est (quatre à trois mille ans).

15/25 Bref, donc, revenons à notre équation. Et remarquons que ce facteur est le deuxième, après le nombre de formations d'étoiles par an, à prendre en compte un aspect temporel. Ce qui semble dessiner une histoire plutôt simple : les civilisations ne durent qu'un temps limité, OK, mais comme de nouvelles étoiles se forment régulièrement, avec leurs planètes autour d'elles où d'autres civilisations vont apparaître, l'un dans l'autre, ça doit se compenser, non ?

Ben en vrai ce n'est pas aussi clair que ça. Parce que ce raisonnement implique qu'il y ait un lien entre les deux, donc une forme de régularité. Ou bien un nombre suffisant de civilisations autour de nous pour pouvoir faire une moyenne. Or, les valeurs des paramètres utilisées par Drake (pas mal optimistes, on l'a vu) nous donnent un résultat de 10 civilisations avec lesquelles nous pourrions communiquer. Ce qui paraît un peu peu pour faire des moyennes fiables.
Image du mème venu de South Park montrant le plan des gnomes en trois étapes dont la seconde (et la façon dont elle reliera les deux premières) est très incertaine, rendant le tout assez bancal. Ici, la phase 1 est illustrée par la photo prise par le télescope spatial James Webb des célèbres piliers de la création, un nuage de gaz où des étoiles sont en train de se former, et la phase 3 par une photographie des antennes en réseau du radiotélescope d'ALMA, dans le désert de l'Atacama au Chili.

14/25 Certaines personnes objecteront peut-être qu'on hérite encore en grande partie de la culture gréco-romaine, et qu'on lit toujours des auteurs de l'antiquité, comme Aristote. Alors, n'est-on pas toujours la même civilisation ? Alors, d'une part, j'invite ces personnes à se renseigner un peu sur la notion de « biais du survivant », parce que bon, pour un Aristote qui a été conservé, de combien d'auteurs a-t-on perdu les écrits, si on les a seulement retenus ?

D'autre part, ça ne fait au mieux que 2 500 ans, soit un quart de la durée « moyenne » estimée, et on a quand même particulièrement changé de façon de penser depuis. Lisez les threads de @hist_myth sur l'Histoire de Rome, par exemple : on a hérité de pas mal de choses de l'époque, mais le temps a quand même pas mal joué aussi, et heureusement.
Image classique illustrant le biais du survivant : le plan d'un avion militaire avec une multitude de points rouges indiquant les endroits où ont été relevés des impacts de tirs ennemis. Le réflexe pourrait être ici de chercher à blinder davantage les zones fréquemment touchées… mais il serait probablement plus intéressant de blinder plutôt les zones où aucun impact n'a été relevé, puisque cela signifie que les avions ayant été touchés à ces endroits ne sont pas revenus.

13/25 À quel point cette estimation est-elle crédible ? Commençons par rappeler que dix mille ans, c'est à peine moins que ce qui nous sépare de la plus ancienne invention de l'agriculture, celle du « croissant fertile ». L'invention de l'écriture, qui nous a fait passer de la préhistoire à l'Histoire, n'a pour sa part qu'un peu plus de cinq mille ans.

Or, on a quand même pas mal changé de modes de société depuis cette époque. Un bon paquet de fois, même. Pour ne pointer qu'un seul aspect du problème, et j'invite les gens de @tract_linguistes à me corriger si je me trompe ici, mais on a mis pas mal moins de mille ans à voir émerger un bon paquet des langues européennes actuelles à partir du seul latin. Les langues qu'on parlera dans dix mille ans, si on tient jusque là, n'auront juste plus rien à voir avec les actuelles.
Représentation sous forme d'arbre (stylisé) des relations de parenté entre les différentes langues issues de l'indo-européen. On voit notamment, sur la droite de l'image, deux branches menant aux langues germaniques, dont notamment l'anglais et l'allemand, et aux langues romanes, ayant donné tous les descendants actuels du latin (espagnol, italien, portugais, français, etc.)

12/25 Reste enfin le dernier paramètre, à savoir la durée de vie moyenne d'une civilisation. Rappelons que nous ne prenons ici en compte que les espèces en état de communiquer, et que donc, de ce point de vue, il ne faudrait compter la nôtre qu'à partir du moment où nous avons commencé à émettre des signaux vers l'espace et à chercher à en capter, soit… dans les années 1930 !

Je ne vais pas revenir davantage là-dessus pour l'instant, mais au rythme auquel nous pourrissons actuellement notre environnement, il faudra prendre des mesures assez importantes si on veut que notre contribution à cette moyenne dépasse les deux siècles. Ce qui est plutôt loin de la valeur estimée par Drake, à savoir dix mille ans.
Vue aérienne des incendies ayant eu lieu en Californie il y a quelques années. On voit un grand nombre d'arbres en train de brûler, et surtout un panache de fumée qui couvre plus de la moitié de l'image. Les incendies à répétition sont une des conséquences du dérèglement climatique.

11/25 On peut aussi revenir un peu au cas, rapidement mentionné la semaine dernière, des planètes ou lunes avec un océan sous-marin : même si une forme de vie « intelligente » (dans la plupart des sens du terme) apparaissait dans un tel environnement, elle serait simplement incapable d'émettre quoi que ce soit vers l'espace, et donc de communiquer avec nous.

Donc, c'est pertinent de distinguer ces deux critères. Il n'empêche que nous n'avons pas plus d'éléments dans un cas que dans l'autre pour les évaluer. Quelle proportion de planètes habitées pourrait développer une vie « intelligente » ? Quelle fraction de ces vies intelligentes pourrait et voudrait communiquer ? Drake estimait 0,01 dans les deux cas, mais, à ma connaissance, ça reste une supposition gratuite.
Vue en coupe de Ganymède, la plus grosse des lunes de Jupiter (pour changer d'Europe dont j'ai déjà parlé plusieurs fois). Jupiter est visible (mais floue) à l'arrière-plan, et les différentes couches qui constituent le satellite naturel sont légendées. On note la présence d'un océan d'eau salée, mais piégé sous une couche de glace, empêchant toute communication avec l'espace.

10/25 Pour les deux facteurs suivants, en revanche, ça commence à devenir complètement de l'extrapolation gratuite. D'abord, il faudrait définir ce qu'on appelle « vie intelligente », ce qui est loin d'être évident : selon la définition qu'on prend, le nombre d'espèces intelligentes vivant présentement sur Terre pourrait sans doute être discuté, mais je vais éviter de me lancer dans ce genre de considérations pour l'instant.

On peut en tout cas remarquer que Drake a fait deux facteurs différents pour distinguer le fait qu'une forme de vie soit « intelligente » de sa capacité à (ou volonté de) communiquer, ce qui est plutôt une bonne chose. Typiquement, notre espèce humaine est apparue il y a environ 300 000 ans, sans changement notable dans nos capacités cognitives depuis, et pourtant nous n'émettons des signaux vers l'espace que depuis moins d'un siècle.
Photographie de 花火 子 (Hanabi-ko, soit « enfant de feu d'artifice »), dite Koko, gorille éduquée par l'éthologue Penny Patterson et qui était capable de communiquer avec nous en utilisant la langue des signes américaine, signe que la maîtrise du langage, au moins, n'est pas une spécificité humaine.

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