Le Livre d'Argent

Alors, il paraît qu'on est de nouveau vendredi. Franchement, le calendrier n'est pas très original, hein, on aurait presque l'impression que ça arrive toutes les semaines, et en plus au même moment. M'enfin bon, du coup, on va en profiter pour vulgariser encore un peu, et ça va nous faire un beau #Vulgadredi de seize pouets, c'est un format qui marche bien.

Et pour ce nouveau #VendrediVulga, donc, on va continuer de parler biologie. On reviendra sur l'astronomie bientôt, il faut toujours que je vous parle d'héliocentrisme, mais avant ça, il nous reste quelques trucs à évoquer ici. En effet, on a d'abord parlé de Darwin (et Wallace !) et de sélection naturelle, puis de Linné et de classification, mais pas encore d'hérédité, ni donc de Gregor Mendel.
Capture d'écran du film de Disney « Le Roi Lion », dans laquelle on voit Mufasa, un lion adulte, et son fils Simba, un lionceau, de dos, en train d'admirer un coucher de soleil visible dans le lointain. Le film, bien qu'évoquant le « cycle de la vie », ne parle pas directement de ce dont il va être question dans ce thread ; mais on peut quand même noter que Simba, en grandissant, ressemble beaucoup plus à son père qu'à son oncle Scar, l'antagoniste principal du film. Pour les illustrations, je fais ce que je peux.

2/16 Il faut dire que Gregor Mendel était, de son vivant, beaucoup moins connu que son contemporain Charles Darwin, qui avait déjà une certaine notoriété depuis la parution des notes de son voyage à bord du Beagle, avant que l'Origine des espèces ne révolutionne toute la biologie de son époque, ou que Carl von Linné, qui les précédait tout deux d'un siècle, et dont le Systema Naturæ a été l'ouvrage de référence pour un grand nombre de biologistes.

En fait, au moment de la parution des travaux de Mendel, seuls les botanistes s'y sont intéressés. Et certains d'entre eux n'étaient même pas spécialement convaincus par ses résultats, pointant quelques failles dans sa façon de faire. Pas vraiment l'archétype du scientifique révolutionnaire qui marquera son époque et les suivantes, donc.

Ah, oui, je suppose que tout le monde a entendu parler de Darwin, mais si c'est la première fois que vous lisez le nom de Linné, vous avez loupé ce thread-ci : https://fadrienn.irlnc.org/notice/Ayq6HnZA7DBl1vwY2S

3/16 Sauf qu'une trentaine d'années après la parution de ces travaux, après la mort de Mendel lui-même, trois scientifiques différents, nommés Hugo de Vries, Carl Erich Correns et Erich von Tschermak, parvinrent, indépendamment les uns des autres, à des conclusions assez proches. Et puisqu'il publièrent tous environ au même moment, il n'était pas évident de décider auquel des trois accorder la paternité de cette découverte.

C'est donc à cette occasion que, fouillant dans les archives, on retrouva les publications de Mendel dont les conclusions étaient très similaires. Et que les trois scientifiques acceptèrent de lui laisser la paternité, évitant ainsi quelques casses-têtes inutiles. C'est donc principalement par un concours de circonstances que ce dont nous allons parler est désigné aujourd'hui comme les « lois de Mendel ».

Au passage, le fait que plusieurs scientifiques arrivent indépendamment aux mêmes conclusions, c'est toujours intéressant, mais ça je l'avais déjà évoqué dans le thread sur Darwin : https://fadrienn.irlnc.org/notice/AybcCRXAswcqPg6ZLE

4/16 Mais donc, de quoi s'agit-il ? Mendel, moine puis abbé de profession, était passionné par les sciences naturelles et plus particulièrement par la transmission des caractères. Il tentera ainsi de mettre en place quelques élevages de souris sur son temps libre, mais ce type de passe-temps ne plaisait pas tellement à son évêque.

Il se tournera alors vers la culture des pois, passe-temps un peu plus acceptable aux yeux de son entourage professionnel et religieux, mais qui lui permettait de réaliser environ le même genre d'expériences. C'est donc pour cette raison que ses travaux ont d'abord surtout intéressé les botanistes.
Photographie d'un plant de pois trouvé sur Wikimédia Commons. On y voit des tiges sur lesquelles poussent des feuilles et pendent des gousses, gousses qui contiennent les petites graines rondes que nous mangeons habituellement. En l'occurrence, toutes les parties végétales de cette image sont vertes, mais il existe des variétés avec des gousses (et donc des graines) de différentes couleurs. Je ne sais pas précisément quelle variété de pois cultivait Mendel, mais ça devait probablement ressembler à quelque chose comme ça.

5/16 Les pois qu'il essaye de croiser entre eux ont plusieurs caractéristiques remarquables. Notamment au niveau de la forme : certains sont ronds et plutôt lisses, quand d'autres sont au contraire cossus. Un autre aspect intéressant est la couleur : certains sont plutôt jaunes, et d'autres plutôt verts. À l'origine, Mendel utilise des pois de souche pure, qui présentent les mêmes caractéristiques depuis plusieurs générations.

Mais notre abbé est intéressé par les hybrides, et il tente de croiser des formes différentes entre elles. Et il constate que, quand il croise des pois jaunes avec des pois verts, les enfants sont systématiquement jaunes. En tout cas lors de la première génération ; car lorsqu'il croise ces hybrides entre eux, quelques pois verts recommencent à apparaître, en moins grande proportion. Environ un pois vert pour trois pois jaunes.
Schéma illustrant les croisement entre les pois, que j'ai assemblé pour mon livre (d'où le fait que ce soit en noir et blanc) à partir des images du tableau présent sur la page Wikipédia parlant des lois de Mendel. Sur le modèle d'un arbre généalogique (environ), on voit sur la première ligne deux croisement entre pois lisses et cossus (en noir et blanc, ça se voit mieux que la couleur), donnant chaque fois des enfants lisses sur la deuxième ligne. Celle-ci présente cependant aussi le croisement entre un pois issu de chacune des deux familles, et dont trois des descendants sont lisses, mais le quatrième cossu.

6/16 Il n'y a donc pas de mélange des caractéristiques comme on pouvait encore le croire à cet époque ; mais l'information qui disparaît à une génération donnée ne semble pas complètement perdue, puisqu'elle est susceptible de réapparaître ensuite (et je parle ici de la couleur, mais il constate le même genre de choses pour la forme, comme le montrent d'ailleurs les illustrations).

Mendel va donc supposer que chaque pois contient deux fois l'information représentant chaque caractère. Pour les pois de souche pure, présentant la même variante depuis pas mal de générations, ces deux exemplaires de l'information sont toujours identiques, ce qui fait que les hybrides de première génération possèdent donc forcément deux exemplaires différents, un venant de chaque parent.
Photo d'une souris de laboratoire au pelage grisâtre, trouvée sur Wikipédia. Que Mendel se voit interdire de continuer ses élevages de souris a sans doute été bénéfique pour ses recherches, car la couleur des souris dépend de mécanismes un peu plus complexe que celle des pois, et dépend de plusieurs gènes : les résultats auraient donc probablement été moins tranchés s'il n'avait pas dû changer de sujet d'étude.

7/16 Pourquoi dans ce cas une seul des deux variantes possibles est-elle exprimée ? Il existe probablement un mécanisme qui fait que l'une des deux variantes ne se manifeste pas si elle est en présence de l'autre. Je ne sais pas exactement comment Mendel notait ça, mais, dans le vocabulaire actuel, on dit qu'une des variantes est « dominante » tandis que l'autre est « récessive ».

En tout cas, chaque hybride semble transmettre l'une des deux variantes qu'il possède de manière complètement aléatoire. Ce qui fait que, statistiquement, la moitié des pois résultant de tels croisement vont recevoir eux aussi les deux informations (ils seront alors jaune, comme leurs parents, le vert ne s'exprimant pas dans ce cas), tandis que l'autre moitié recevra soit deux fois la variante jaune, soit deux fois la variante verte, d'où la répartition d'un pois vert pour trois pois jaunes.
Schéma reprenant les mêmes pois que précédemment, qui vient aussi du bref passage de mon livre où je mentionne les lois de Mendel. On voit les quatre pois issu du croisement de seconde génération dans le schéma précédent, chacun accompagné d'un petit panneau indiquant quelles variantes du caractère il contient : le pois cossu contient deux exemplaires de cette information, sinon elle ne s'exprimerait pas (on dit qu'il est « homozygote »). Pour ce qui est des pois lisses, un seul présente une combinaison de deux fois la variante lisse ; les deux autres (qui sont donc « hétérozygotes ») possèdent un exemplaire de chaque variante. Les deux variantes sur les panneaux sont inversées (cossu puis lisse d'un côté, lisse puis cossu de l'autre), montrant que chaque information peut venir indépendamment des deux parents.

8/16 Bien sûr, cette règle découverte par Mendel a ses limites : tous les caractères ne semblent pas fonctionner de cette manière, et les choses doivent être un peu plus compliquées pour d'autres. Néanmoins, ce principe peut s'appliquer à pas mal d'autres caractères et à pas mal d'autres espèces : il s'agit du fonctionnement de base de l'hérédité, qui a également été une étape très importante dans notre compréhension du vivant.

Si ces travaux racontent une histoire à première vue assez différente de celle que Darwin et Wallace étaient en train de dessiner au même moment, on s'apercevra plus tard qu'elles sont en fait assez complémentaires l'une de l'autre : simplement, Mendel a tenté des croisements assez systématiques, tandis que, dans la nature, la sélection naturelle va rendre certains croisements plus fréquents que d'autres, et donc faire varier les fréquences relatives des caractères correspondants.
Photo (venues de Wikimédia Commons) montrant deux phalènes du bouleau, une claire et une sombre, sur le tronc d'un arbre. Ces petits papillons sont un célèbre exemple de cas d'application de la sélection naturelle, que j'ai rapidement mentionné dans le thread sur Darwin et Wallace (même si je pourrais à l'occasion détailler pas mal ce point). Mais ils peuvent aussi servir d'illustration pour les lois de l'hérédité de Mendel : comme pour les pois, les deux couleurs sont deux variantes d'une même information, qui dépendent donc de ce que chaque papillon reçoit de ses parents. Dans ce cas particulier, c'est la variante sombre qui est dominante, et la variante claire était encore pas mal présente de façon récessive quand la couleur sombre était favorisée, accélérant le retour des papillons clairs après inversion de la pression sélective.

9/16 Il restait bien sûr à expliquer par quel mécanisme ces caractères étaient transmis d'une génération à l'autre. Bon, vous, vous savez probablement que c'est grâce à la molécule d'ADN, mais c'est quelque chose qui n'a été mis en évidence que pendant la seconde moitié du ⅩⅩème siècle. Où elle a d'ailleurs pris beaucoup trop d'importance dans notre imaginaire collectif… ainsi que dans certains pans de la recherche, mais lisez le livre de Lecointre que je suggérais la semaine dernière.

La molécule elle-même a en fait été identifiée assez tôt : elle a d'abord été appelée « nucléine » (puisque concentrée dans le noyau des cellules) lors de sa découverte en 1869, seulement deux ans après la première publication des travaux de Mendel. Mais les instruments de l'époque ne permettaient pas tellement d'en savoir plus.

Ah oui, au fait, si vous avez manqué le thread de la semaine dernière, c'est là : https://fadrienn.irlnc.org/notice/Az4eUNTUYDyCWntqim

10/16 C'est Rosalind Franklin qui, en 1953, sera la première à identifier la structure en double hélice de l'ADN… mais un collègue travaillant dans le même laboratoire qu'elle, Maurice Wilkins, montrera les résultats de ses travaux à James Dewey Watson et Francis Crick, lesquels s'empressèrent de les récupérer à leur compte et de les faire publier en ne mentionnant qu'à peine Franklin.

Ils recevront le prix Nobel pour cette découverte en 1962. Officiellement, le Nobel n'aurait pas pu être remis à Franklin, car il ne récompense que des personnes vivantes et qu'elle est morte d'un cancer en 1958. Il n'empêche que Watson et Crick ont tout fait pour s'approprier ses recherche et minimiser son rôle dans l'histoire, donnant l'un des hélas beaucoup trop nombreux exemples de travaux scientifiques usurpés par des hommes après avoir été réalisés par une femme.
Représentation classique de l'ADN en double-hélice, montrant l'enchaînement des différentes bases azotées, qui sont les éléments constitutifs des gènes. Il en existe quatre sortes : Adenine, Thymine, Guanine et Cytosine. L'image nous montre (en indiquant à chaque fois le type de base à l'aide de son initiale) qu'elles fonctionnent par paires complémentaires, un A toujours en face d'un T et un C toujours en face d'un G. La légende désigne également le support auquel ces bases sont rattachées comme une colonne sucre-phosphate (colonne qui est ici plutôt une ligne, puisque l'image, qui vient de la page Wikipédia sur l'ADN, est initialement verticale, mais que je l'ai retournée pour que ça passe mieux au format Fédivers).

11/16 Avec le vocabulaire moderne, on dit que les caractères comme la couleur ou la forme des pois, ou encore notre groupe sanguin, sont codés par des gènes. Dans ces différents cas, un gène unique correspond à un caractère, et la correspondance est donc facile à identifier. Nous recevons une moitié⁽*⁾ de notre ADN de chacun de nos deux parents, et la plupart des gènes sont en double exemplaires, ce qui correspond bien à ce que Mendel avait supposé à son époque.

Quelques différences au sein de ces molécules conduisent à l'apparition de plusieurs variantes différentes d'un même gène, on parle d'« allèles », chaque allèle correspondant à une des variantes du caractère que l'on peut observer. Pour le gène codant pour notre groupe sanguin (je mets de côté le rhésus et compagnie pour simplifier), il existe trois allèles, que l'on appelle usuellement A, B et O.
Schéma (trouvé sur Wikimédia Commons) montrant de façon simplifiée la fécondation : à partir d'un spermatozoïde et d'un ovule comprenant chacun un exemplaire de l'information génétique, on forme une cellule-œuf qui contient un exemplaire de chaque, mélangeant donc les gènes des deux parents. Le spermatozoïde et l'ovule étaient donc eux-mêmes constitués à partir d'une moitié des chromosomes de la personne qui les a produites, mais le schéma ne rentre pas dans les détails à ce point, on pourrait en reparler une prochaine fois.
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12/16 L'allèle O est récessif, c'est-à-dire qu'il ne s'exprimera que si nos deux exemplaires du gènes sont tous les deux des O. Dès qu'un parent nous transmet un A ou un B, c'est celui-ci qui s'exprime. Néanmoins, le groupe sanguin O est majoritaire dans notre espèce (avec toutefois des différences de fréquence selon la population considérée), ce qui indique donc qu'il doit être favorisé par la sélection naturelle.

Notre groupe sanguin présente cependant une caractéristique que Mendel n'avait pas pris en compte : entre les allèles A et B, il n'y a pas de relation de dominance. Si les deux sont présents en même temps, alors les deux s'expriment, nous donnant donc un groupe sanguin « AB » qui n'existe que quand nous portons ces deux versions différentes (et est donc beaucoup plus rare).
Tableau (constitué à partir d'un tableau plus général trouvé sur Wikipédia) montrant les quatre sortes de globules rouges possibles dans le sang en fonction des allèles. Quand un individu possède deux allèles A, ou bien un allèle A et un allèle O, il est du groupe A, car ses globules rouges présentent en surface une molécule caractéristique. Idem, quand un individu possède deux allèles B, ou bien un allèle B et un allèle O, il est de groupe B, car ses globules rouges présentent une autre molécule caractéristique en surface. S'il possède un allèle A et un allèle B, il est de groupe AB, car on voit les deux sortes de molécules caractéristiques sur ses globules rouges. Enfin, s'il possède deux allèles O, il est de groupe O, car aucune des molécules caractéristiques ne se met en place. Le groupe sanguin est une information très importante à connaître pour réaliser une transfusion, car les molécules caractéristiques vont activer des réactions immunitaires auprès de groupes incompatibles.

13/16 Vous avez remarqué l'astérisque deux pouets plus haut ? En fait, nous ne recevons pas vraiment la moitié de notre ADN de chaque parent. Enfin, si, mais seulement pour ce qui concerne l'ADN qu'on trouve dans notre noyau cellulaire, alors qu'on en trouve aussi ailleurs. Mais on verra ça avec un peu plus avec plus de détails dans le thread de la semaine prochaine, comme ça je tease un peu.

En attendant, et puisque je vous ai déjà causé à plusieurs reprises d'hypothétique vie extraterrestre dans ces threads (c'est même de là que cette série est partie), on peut quand même préciser une chose : les « lois de Mendel » sur l'hérédité sont a priori beaucoup moins universelles que ne le sont les travaux de Darwin.

Allez, pour les gens qui sont arrivés en cours de route (d'autant que je n'avais pas encore pensé au hashtag au début), le premier thread de la série est là : https://fadrienn.irlnc.org/notice/AwGiNCEL9iX8pAJcTw

14/16 En effet, l'évolution et la sélection naturelle sont des phénomènes assez indépendants du support. Comme je l'indiquais dans ma vidéo sur le sujet, on a déjà, ici sur Terre, d'autres applications de cette théorie générale qui n'ont pas grand chose à voir avec la biologie, par exemple en linguistique.

Pour l'hérédité, en revanche, le fait d'avoir deux exemplaires de chaque gène vient plus spécifiquement de la façon dont fonctionne notre reproduction sexuée. Nous avons chaque gène en double parce que nous mélangeons l'information génétique venant de nos deux parents (lesquels transmettent aléatoirement une des deux qu'ils possèdent). Mais c'est loin d'être la seule façon de faire.

Au fait, je vous remets le lien de la vidéo encore un coup ? Allez, oui : https://skeptikon.fr/videos/watch/20f8140e-2197-41ae-b033-86fc69b059f9

15/16 Déjà, même parmi les organismes qui pratiquent la reproduction sexuée, tout le monde ne procède pas exactement de la même manière. Chez les mousses, par exemple, cette combinaison avec les gènes en double (on parle de « diploïdie ») n'arrive qu'au moment de la fécondation. Pendant la plus grande partie de la vie de l'organisme, seul un exemplaire de chaque gène est conservé, on dit donc que ces organismes sont « haploïdes ».

Ce qui peut se produire même chez les animaux : les mâles abeilles, par exemple, sont haploïdes ; seules les femelles reçoivent chaque gène en double et sont donc diploïdes. Chez les champignons (qui sont plus proches des animaux qu'eux ou les animaux ne le sont des plantes, comme je le mentionnais la dernière fois), des phases haploïdes et d'autres diploïdes peuvent s'enchaîner au cours de la vie de l'organisme.
Comparaison de deux systèmes de reproductions possibles, trouvées sur Wikipédia. On voit dans les deux cas d'abord les cellules typiques des deux parents, qui produisent ensuite des cellules sexuelles (ovule et spermatozoïdes), lesquelles se combinent pour donner une cellule-œuf qui donnera ensuite naissance aux cellules de l'organisme enfant. La différence est que, dans un cas, les parents sont haploïdes (on voit un seul échantillon génétique par cellule), et l'information génétique est répartie dès la première division de la cellule-œuf, qui est donc la seule à porter les gènes en plusieurs exemplaires. Dans l'autre cas, qui est celui qui correspond à notre espèce, les parents sont diploïdes, et il n'y a qu'à l'étape de la production des cellules sexuelles qu'un seul exemplaire de chaque gène est présent.

16/16 Et le bazar devient encore plus bazardesque lorsqu'on s'intéresse aux bactéries qui, comme on l'a vu dans le thread de la dernière fois, n'ont pas de reproduction sexuée, et sont même capables de changer leur ADN en cours de vie. Le fonctionnement de l'hérédité décrit par Mendel, comme la classification du vivant de Linné, ne sont finalement que des accidents liés à l'histoire particulière de la vie sur Terre, et auraient pu avoir pris des chemins radicalement différents dans d'autres circonstances.

D'ailleurs, même pour ce qui nous concerne, tous les caractères ne correspondent pas précisément à un gène. Certains, comme par exemple notre taille, correspondent à une combinaison de plusieurs gènes ainsi qu'à des facteurs environnementaux (comme la quantité de nourriture disponible pendant la croissance). Un des trucs chouettes avec la biologie, c'est que du bazar qui s'auto-organise sur des centaines de millions de générations, ça peut difficilement être qualifié de monotone.
Capture d'écran du documentaire Espèces d'espèces montrant un échantillon du monde vivant représenté par des animaux et végétaux dans divers styles graphiques en train de bouger dans tous les sens. Le présentateur de l'émission (qu'on devine au milieu de l'image, mais sa tête n'est pas visible, un animal étant en train de passer au premier plan devant lui) explique « Là, on est au milieu d'un fouillis assez indescriptible. »