Le Livre d'Argent

Comme promis, ce soir, on continue la lecture de Tite-Live dans la joie, la bonne humeur et l'agitation tribunicienne contre l'oligarchie sénatoriale !
On a vu Rome chasser à coups de pieds dans le fondement divers autocrates confirmés ou en puissance, et se maraver tous les ans avec ses voisins. Qu'adviendra-t-il de la cité et les Volsci et Aequi vont-ils lui lâcher la grappe ? (spoiler : non)

Tite-Live, livre IV, un THREAD ⬇️

Monnaie romaine du premier siècle avant J.C., avec trois hommes représentés. A gauche, un homme enveloppé dans une toge, la tête couverte, pointe du doigt un personnage central. Celui-ci, représenté en plus grand, lève la main au-dessus de l'homme de gauche comme pour le prendre sous sa protection. C'est donc un tribun de la plèbe. Complètement à droite arrive un personnage plus petit portant un bâton dans chaque main, peut-être le licteur d'un consul ou bien l'appariteur (sorte de garde du corps) du tribun.
Sous les trois personnages est écrit provoco, en latin "je fais appel", autrement dit je fais usage de mon droit à être jugé par un tribunal populaire plutôt que de subir la sentence d'un magistrat.

Mais avant toute chose, si vous prenez en route les aventures de Rome face aux méchants tyrans et aux voisins pénibles, filez voir les épisodes précédents :
> Livre I ép. 1, les rois c'est top cool : https://mastodon.top/@hist_myth/112792214027813066
> Livre I ép. 2, les rois c'est naze en fait : https://mastodon.top/@hist_myth/112831548405415415
> Livre II ép. 1, grève générale ! https://mastodon.top/@hist_myth/112916453684941402
> Livre II, ép. 2, le patriciat contre-attaque : https://mastodon.top/@hist_myth/112944904603090808
> Livre III, écrire les lois, c'est pas la joie : https://mastodon.top/@hist_myth/113101780632236224

DONC ! Votre humble servante a parcouru en détail le livre IV et, ne nous mentons pas, après les trois grosses révoltes des livres I, II et III, ce livre manque un peu de baston et autres contestations sociales. Cela tient aussi au mode de narration de Tite-Live qui raconte les événements année par année sans sélectionner les passages intéressants ni densifier. Alors oui, y a toujours une petite invasion de Veii ou des Volsci pour chasser l'ennui, mais tout de même, l'éclate n'est pas extrême.

Ca commençait pas mal pourtant.

En effet, Rome, ayant expulsé les décemvirs au livre III, s'aperçoit que dans la loi des Douze Tables de ces poutinoïdes trumpistes, les mariages entre plébéiens et patriciens étaient... interdits.

Oui. Interdits. Par la loi.

"Woooh hé ho on n'est pas une société de castes ici ! vocifère le tribun de la plèbe Gaius Canuleius. Enfin si mais bon mais ça a pas à être dans la loi ! Chaque père marie sa fille comme il veut, et le droit sacré du patriarcat ?

"Si c'est comme ça, je dépose un double projet de loi, s'échauffe le tribun Canuleius : 1/ les mariages plèbe/patriciat sont autorisés et 2/ pour les élections des consuls... il sera permis d'élire un plébéien."

Réaction tout à fait saine et équilibrée des patriciens :

"😡🤬 🤢🤮 jamais jamais jamais et tiens oh ! tiens ! Ardea pas contente de votre arbitrage en fin de livre III fait sécession ! les Volsci et Aequi veulent se battre ! CHIC UNE GUERRE !"

Mais Canuleius ne plie pas.

Puisque les patriciens prétextent la guerre pour empêcher le vote de sa loi, Canuleius empêchera les consuls de recruter les troupes jusqu'à ce qu'on la vote, une tactique utilisée par les tribuns de la plèbe depuis le livre II.

Les consuls sont tout vexés et râlent devant le sénat que les tribuns sont trop pas gentils.

En même temps, face au peuple, Canuleius organise une contre-soirée, enfin une contre-harangue, que Tite-Live nous expose au long et au discours direct pendant 5 pages.

Canuleius lance discours virtuose de 5 pages devant la plèbe !
C'est très efficace !

Les consuls essaient de répliquer avec leur attaque exclusive Excuse Pourrie !

Face à la plèbe, ils expliquent :
– Un non-patricien n'est pas d'assez bonne race pour prendre les auspices, comme doit le faire un bon consul.
– Euh... vous pouvez répéter ? fait la plèbe, fronçant les sourcils très fort.
– D'où les mariages mixtes interdits. Pour éviter les enfants *pas assez purs*.
– Queument quoi pardon ?

– Attends, s'émeut la plèbe, les mecs ils viennent nous dire qu'on peut pas prendre les auspices, genre notre RACE est pas assez PURE pour les DIEUX ?

La plèbe, furieuse à l'idée qu'on taxe Jupiter de racisme comme le premier Bruno Retailleau venu, s'enflamme jusqu'à ce que les Pères craquent et laissent passer le projet de loi sur les mariages mixtes.

Mais pour l'élection des consuls, ils renâclent, et ce n'est qu'après une lutte politique très dure qu'on atteint un compromis.

Seuls les patriciens pourront devenir consuls, oui, MAIS, on crée une nouvelle magistrature toute belle et rutilante :

⭐ le tribun militaire à pouvoir consulaire ⭐

Chaque année, sur choix du sénat, on élira soit des consuls soit des tribuns militaires avec les mêmes pouvoirs, et ceux-ci POURRONT être plébéiens !*

(* Offre soumise à la condition d'une élection des tribuns en comices centuriates, un processus pensé depuis le VIe siècle pour surreprésenter le vote des classes favorisées)

S'ensuit alors la première élection de tribuns militaires à pouvoir consulaire, des tribuns MPC allons-nous dire pour gagner des caractères. Les patriciens sont d'abord choqués, car non seulement il s'y présente des candidats plébéiens, mais ils osent faire campagne, fi, courant les places de Rome, distribuant des promesses électorales... et ce n'est qu'à contrecoeur que quelques patriciens déposent leurs candidatures. D'ailleurs, les trois tribuns MPC élus sont patriciens.

Comme par hasard.

Et de toute façon cette première élection est annulée pour vice de procédure lors de la prise des auspices, comme par hasard.

Après un petit intervalle, le Sénat décide de tenir de nouvelles élections, et puisqu'il a le choix entre consuls et tribuns MPC au menu, hmmm, dur comme choix, hmm, ce sera des consuls finalement, avec un petit verre de Château-Lafite, merci.

On se rabiboche avec Ardea, on évite la guerre pour cette année, et on passe à autre chose : créer une nouvelle magistrature.

Voyez-vous, à Rome, tous les cinq ans, les consuls étaient chargés du census : faire le recensement des citoyens et de déterminer à quelle classe électorale ils appartenaient, selon leurs revenus. Et c'était lonnnnng et chiannnnt. Aussi le sénat, pouf, un beau matin de 443, se dit : "Et si on créait un magistrat chargé du census ? On l'appellerait le censeur. Il serait en poste 5 ans. Ce serait un petit boulot sans intérêt, juste de la paperasse."

Personne n'y voyant d'inconvénient, on crée.

Et pour ce petit boulot sans intérêt, on nomme deux anciens consuls.

Hmm. Un petit boulot sans intérêt qui attire les ex-numéros 1 de Rome. Curieux. On s'en reparlera.

Après quoi, le sénat reçoit un message de la cité d'Ardea. Là-bas, une Ardéate force sa fille à épouser un Ardéate noble alors qu'elle est amoureuse d'un bel Ardéate plébéien, et l'affaire déchaîne la cité, poussant la plèbe et l'aristocratie à s'empoigner.

Que fait le sénat devant ces Roméo et Juliette antiques ?

Eh bien Rome envoie l'armée romaine POURRIR LA PLEBE D'ARDEA et forcer la FILLE à EPOUSER le NOBLE comme l'a prévu sa MERE sale môme !

Je m'en empaume la face.
Le sénat romain, dans Roméo et Juliette, il envoie ses légions à l'acte II tout raser jusqu'à ce qu'on marie Juliette avec Tybalt.

Bref. Passons vite fait sur deux-trois années, avec des luttes tribuns/consuls, le sénat qui oublie cette histoire de tribuns MPC, une petite guerre gagnée contre les Volsci, la routine.

En 440, famine.

Eh oui, en 440 les récoltes de blé furent catastrophiques, un désastre que Tite-Live attribue, sans vergogne, en partie à la politique : tous ces plébéiens qui s'occupent des affaires de la cité, hein, ils s'occupent plus du blé ! (mon facepalm doit résonner par-delà le cosmos) La plèbe nomme alors un magistrat chargé du ravitaillement, Lucius Minucius. Minucius se démène pour acheter du blé aux voisins et rationner l'existant, mais galère. Et pour quoi? A cause d'un type. Spurius Maelius.

Spurius Maelius a deux choses : de l'ambition, et de la thunasse. Ce qu'il n'a pas, en revanche, c'est le statut de patricien pour choper le pouvoir. Mais qu'importe. Il va s'occuper de cette famine. Il allonge son oseille pour s'acheter du blé. Il stocke et stocke et accapare (pourrissant les efforts de Minucius), puis, devant la plèbe émerveillée, fait d'énormes distributions de blé aux nécessiteux. Sous-entendu : en échange d'aide... le moment venu. Wink wink nudge nudge.

Bientôt Spurius Maelius s'attire une armée de fans inconditionnels aussi bornés que ceux de Musk. Mais que veut-il ? se présenter au consulat ? Il n'est pas patricien, et pas d'élections de tribuns MPC en vue. Jusqu'à ce qu'un jour, au sénat, boum, révélation : Minucius dévoile que Maelius prépare un coup d'État pour se faire roi de Rome.

– ROUAH ? beugle le sénat avec un frisson d'horreur devant cette prétention horrible. VITE il faut protéger notre liberté en nommant un dictateur !

À nos oreilles modernes cela semble peu logique, mais jà Rome un dictateur est un magistrat spécial qui a tous les pouvoirs pour une durée super limitée et une mission précise.

Là, pour mater Spurius Maelius, on nomme le Patricien Pur Jus Pétri de Rigueur Morale(TM) Lucius Quinctius Cincinnatus.

Le type qu'on était allé chercher dans son champ au livre III.

– Mais je suis trop vieux pour ces conneries, ronchonne Cincinnatus, cependant il accepte, et nomme pour second Gaius Servilius Ahala.

@hist_myth il crée une nouvelle magistrature ? tant que je gagne, je joue !

@gfadrelle "Et une magistrature pour toi ! Et une magistrature pour toi aussi ! Et une magistrature pour tout le monde !"

https://tenor.com/fr/view/stillesque-gif-25544869

Le lendemain, Cincinnatus, 80 ans, descend au forum avec Ahala.

La plèbe s'étonne. D'où on lui a dépoussiéré ce vieux schnoque rigide comme la mort ?

– Ahala, fait Cincinnatus, va me chercher Spurius Maelius.
– Spurius Maelius, dit Ahala au philanthrope richard et monarchiste, le dictateur veut te voir.
– Me voir ? Pourquoi ?
– Pour te défendre de l'accusation de Minucius.
– Quoi mais comment mégérienfésépajuste je veux pas j'irai pas J'IRAI PAS ouiin, réagit très sereinement Spurius Maelius.

CW violence et meurtre politique

Maelius essaie de se planquer, Ahala le fait arrêter par son appariteur (= garde du corps si on veut), l'entourage de Maelius intervient, le nabab décampe, le gradé le poursuit, Maelius hurlant "on veut ma peau aidez-moi révoltez-vous c'est un complot des vils patriciens judéo-illuminati-reptiliennnns !", Ahala marchant avec une épée en main, et paf, Ahala rattrape Maelius et le tue sans autre forme de procès.

– Dictateur, fait Ahala, j'ai tué le rebelle qui cherchait à faire se mutiner la foule.
– Très bien, tu as sauvé Rome et tout ça, fait Cincinnatus, rentrons, je prends une camomille et j'abdique.

Bon, en vrai, dans le texte, Cincinnatus doit se fendre d'un petit discours pour ramener le calme parmi la plèbe furieuse de cette justice expéditive, discours pendant lequel il argue que non seulement Maelius voulait tyranniser Rome, mais qu'il était même pas de bonne famille, fi.

Le meurtre de Maelius a fait repartir les tribuns de la plèbe comme en 40 (ou en 445), et ils font pression pour obtenir des tribuns MPC cette année au lieu de consuls. Si une petite année Rome a donc des tribuns MPC (tous patriciens encore, parce que suffrage censitaire), arrive, devinez quoi ? Une guerre. Une grosse baston contre la ville étrusque de Veii, mais aussi Fidenae, colonie romaine, et Falerii, deux villes que Veii a gagnées à sa cause.

– Faut donc des consuls, impose le sénat.

Les consuls se révèlent cependant décevants à la guerre, ce qui amène le sénat à créer un dictateur, une baston a lieu contre les troupes de Veii menées par leur chef Lar Tolumnius, Cossus un Romain patricien et cossu fait des trucs braves et beaux et rapporte des dépouilles opimes.

Deux années plus tard, en 434, Rome conquiert Fidenae, ce qui douche un peu la ville de Veii ; elle appelle à l'aide les autres cités étrusques, qui lui répondent que ses problèmes ne sont pas leurs problèmes.

– Bon, ben alors, on fait pas la guerre à Rome si c'est comme ça, soupire Veii.
– Oh, ben alors, on va pas faire la guerre à Veii si c'est comme ça ? s'étonne Rome.

Car en ville, on était parti pour fesser Veii : on avait même nommé dictateur Mamercus Aemilius. Celui-ci est triste de ne rien faire de sa dictature. Alors, pour compenser, il décide de s'en prendre à la nouvelle magistrature préférée des patriciens : la censure.

Assez vite, le poste de censeur avait attiré l'intérêt des Pères.

Parce que faire le recensement, c'était aussi l'occasion de le "corriger" en déplaçant les désirables et indésirables d'une classe électorale à l'autre, et en comptant différemment les impôts. Le censeur concentrait les pouvoirs du fisc et du gerrymandering ! Et il était en poste 5 ans !

Mamercus Aemilius déclara hautement que 5 ans c'était trop, et, soutenu par la plèbe en délire, il porta une loi réduisant la censure à 1,5 an.

La loi fut approuvée à une majorité écrasante...

... et les censeurs "corrigèrent" aussitôt le statut de Mamercus en l'inscrivant dans une catégorie privée de droit de vote et en octuplant ses impôts.

Parce que, disaient-ils, Mamercus avait affaibli une magistrature du peuple romain.
Leur magistrature.

Le sénat fit collectivement "gloups" et prit bonne note du pouvoir des censeurs.

Après quoi, Pères et plèbe continuèrent leur bras de fer pour savoir s'il fallait élire des consuls ou des tribuns MPC.

Grosso modo, dès qu'ils sentaient que la plèbe pouvait gagner le poste de tribun MPC, le sénat trouvait plein d'excellentes raisons de préférer faire élire des consuls. Sinon, il laissait pisser.

Cette année 431, une attaque des Aequi et des Volsci, ou comme on dit à Rome, un jeudi, leur fournit l'occasion de préférer les consuls.

C'est que les ennemis ne chômaient pas. Recrutant en masse, ils foncèrent occuper une hauteur de la région : le mont Algidus.

Le sénat se met à flipper fort, d'autant que cette année, les consuls se chamaillent, ce qui fout le boxon, et donc on décide de nommer un dictateur pour balayer Aequi et Volsci.
Cependant, qui nomme le dictateur ? Les consuls.
Et qui n'avait pas envie de nommer un dictateur et perdre leur pouvoir ? Les consuls.
La situation était si bloquée que, paradoxalement, le sénat doit faire appel aux tribuns de la plèbe pour qu'ils forcent les consuls à nommer un dictateur. The irony.

Mais enfin, on nomme au poste suprême un certain Aulus Postumius Tubertus, qui recrute à tout-va, et le dictateur plus un consul foncent sur le mont Algidus pour casser des Volsci et Aequi.

Les préparatifs de bataille semblent hors normes. Il y a 4 armées, 2 ennemies, 2 des Romains, 4 camps militaires, qui s'escarmouchent dans tous les sens.
Les Volsci et Aequi n'ont pas très envie, dans ces conditions, d'une bataille rangée.
Et viennent de nuit agresser le camp du consul romain.

@hist_myth
Cincinnatus c'est mon perso préféré!
Avec Mucius Scaevola, mais c'est un vrai geudin lui.

Cincinnatus il sait que la force de Rome c'est la rigueur morale, le travail des champs et des sidekicks au nom rigolo.

@Nanard_Groubiche Ou c'est juste un gros connard réac, mais ça marche aussi.

Moi j'aime bien Horatius et Valerius.

Mais les hurlements des Romains qu'on attaque réveillent vite et le camp du consul, et celui du dictateur !

Et tout ça dégénère en bataille complète avec manœuvres de nuit, remanœuvres à l'aube, décisions du dictateur belles et bonnes et efficaces !

La bataille se déploie, et les Romains envoient fort, ils vont gagner, rien ne peut les en empêcher !!! ah, si. Une harangue d'un personnage secondaire.

Vettius Messius, plébéien volsque, motive ses camarades et relance la baston.

A lui seul. Le pouvoir de la rhétorique.

Et les Romains sont blessés de partout, le consul perd un bras, le dictateur se fait charcuter l'épaule, mais enfin, dans un dernier assaut épique, les Romains se jettent sur le camp des Volsci ; le dictateur a même ce truc des généraux antiques qui consiste à prendre le drapeau d'une compagnie (drapeau à protéger de ta vie et si tu rentres sans c'est honte éternelle sur ta tête) et à le jeter dans l'armée ennemie pour que ses hommes la chargent.

@hist_myth
Bah, c'est Rome.
"Les dionysiaques enculent des ânes? Mehercule, ces gens savent faire la fête! Attendez, ils organisent aussi des coucheries entre femmes libres et esclaves?! Des femmes qui boivent du VIN?!? BURN THE WOKE!"

Horatius Cocles je l'ai, mais de quel Valerius on parle? Celui qui cogne des Etrusque ou bien un autre?

@Nanard_Groubiche Il faut aller lire le thread du livre III. J'ai pas vraiment développé leur rôle dans le thread par manque de place, mais je les aime bien. Publius Volero du livre II aussi envoie du pâté.

Enfin, enfin, enfin les Romains remportent cette bataille du mont Algidus de 431, mettant un terme àux tentatives des Aequi et des Volsci.

Pour 7 ans.
C'est déjà ça.

Mais heureusement, les autres voisins de Rome ne laissèrent pas la ville souffler trop longtemps, et Veii, la cité étrusque, repartit pour un tour dès 427.

Et dès 426, Veii avait réussi, encore, à se concilier Fidenae, la colonie traîtresse de Rome.
À Rome, flûte ! On vient juste d'élire des tribuns MPC.

Les tribuns MPC étaient désorganisés et pas d'accord entre eux, ce qui, affirme Tite-Live, permit à Veii de remporter une petite victoire. Vexé, les Romains nomment un dictateur, qui les engueule d'avoir peur de Veii, et repartent à l'assaut. Cette fois, la bataille se fera devant Fidenae.

Rangement des armées, harangue du dictateur aux troupes, et début d'une baston acharnée où les Romains tapent les Véiens en insultant leurs mères.

Soudain, en pleine maravade, surprise !

De Fidenae sortent des troupes immenses, portant des flambeaux pour les jeter sur les Romains !

Les Romains décontenancés reculent.

– Quoi ! beugle le dictateur, vous avez peur de la fumée maintenant ? Vous êtes des abeilles devant un apiculteur ? Allez les cramer eux !

Galvanisée, la cavalerie charge alors l'ennemie en débridant ses chevaux, la fumée et la flamme disparaissent dans la poussière, les Véiens se débandent, se font massacrer ou se jettent dans le Tibre tout proche. Victoire !

Après ce combat en son et lumière, les Romains s'emparent à nouveau de Fidenae, la pillent joyeusement et emmènent sa population en esclavage. Le fun à la Romaine. De retour à la ville, le dictateur abdique et les tribuns MPC de l'année font célébrer des jeux où ils accueillent fastueusement les étrangers avec la prodigalité d'Anne Hidalgo dans la fan zone de l'Hôtel de Ville. L'éclate.

Mais les luttes patriciens/plébéiens n'étaient pas finies à Rome, ramenées par chaque période électorale.

En gros, chaque année, le sénat choisissait entre consuls et tribuns MPC, ce qui amenait des contestations ; et quand bien même, c'étaient toujours des patriciens qui étaient élus.

– Mais, pleuraient les tribuns de la plèbe avec le désespoir d'un responsable socialiste, comment se fait-ce qu'on défende la plèbe, mais qu'elle vote pas pour nous ?

Ils essayèrent bien de captiver l'électorat en parlant de lois agraires...

... mais le sénat, sentant que ça pouvait amener l'élection de plébéiens, trouva un moyen de les éloigner pour viteuf faire élire des consuls cette année-là. Une idée d'Appius Claudius, fils de celui du livre III, et comme tous les Claudii un réac de la plus belle eau, crachant sur les plébéiens comme il respire.

En 423 donc, Rome se retrouve gouvernée par deux consuls, Gaius Sempronius et Quintus Fabius.

C'est à ce moment que les Volsci décidèrent d'attaquer Rome, pour la tradition.

(Y a un stade où j'admire la persévérance des Volsci et Aequi, je pense, à se faire bouillaver tous les ans par Rome et à y revenir quand même l'année d'après.)

Là, cette fois, les Volsci ont pris du poil de la bête ; ils ont recruté le ban et l'arrière-ban, ils donnent tout ce qu'ils ont.

Le consul Sempronius, chargé de les mater, fait en haussant les épaules : "Boarf, c'est les Volsci, on les bat tous les ans pour se détendre, ça va gazer", et lance une bataille qui tourne au désastre.

Les troupes romaines reculent de partout, Sempronius les engueule mais ça ne sert à rien, on reflue, on va perdre, sans l'intervention miraculeuse d'un cavalier, Sextus Tempanius. Un plébéien ? Tite-Live nous dit que c'est un décurion, donc pas un très puissant. Un patricien ? Tite-Live nous dit que c'est un cavalier, ce qui implique un haut rang dans la société. En tout cas, Tempanius crie à ses camarades de mettre pied à terre et de remplacer l'infanterie qui plie. Et ils sauvent la mise.

Cependant le chef des Volsci, malin, ouvre les rangs et laisse passer la troupe des cavaliers-devenus-fantassins, la séparant de l'armée mal contrôlée par le consul ! C'est un peu la confusion, ce qui ne s'arrange pas avec la tombée de la nuit.

– C'est un désastre, on a perdu, se lamentent les Romains rassemblés autour du consul, et ils quittent leur camp la nuit.
– C'est un désastre, on a perdu, chouinent les Volsci, et ils désertent leur camp la nuit.

En abandonnant les blessés.

Seuls Tempanius et ses suiveurs gardent leur sang-froid, et attaquant le camp des Volsci, ils s'aperçoivent... qu'il est vide ; retournant vers le camp romain, ils s'aperçoivent... qu'il est vide. Marmonnant sûrement "mais quels cons", Tempanius décide de rentrer à Rome au plus vite, en embarquant les blessés abandonnés par son chef.

Il arrive à Rome, où on avait entendu parler d'une défaite, et où on croyait à l'annihilation de l'armée. Et Tempanius est accueilli en héros.

[la suite probablement demain !]

@hist_myth Je suis tellement crevé que j'ai pensé un instant que tu parlais du sénat actuel AngeryCat

@paul_denton ça doit être à cause du château-lafite

@hist_myth j'imaginais pas que tite-live me ferait autant marrer
Je pense que vous y êtes pour beaucoup plus que lui 🙏 même s'il faut bien une source et tout einh respect

Hey, vous compilez ces textes pour les mettre à la dispo je sais pas moi de l'éducation nationale par exemple ? C'est un outil pédagogique de ouf nan ?

@amans C'est une bonne idée, je les mettrai peut-être à dispo au format PDF sur un blog, mais les profs devront voir quoi faire de toutes les blagues sur le gouvernement :D

Cependant, les tribuns de la plèbe se frottaient les mains.

Pour eux, la défaite du consul Sempronius tombait à pic, car ils venaient de lancer une campagne juridique contre d'autres patriciens et c'eût été l'occasion de pointer le consul du doigt et de bramer : "Tous des pourris ! on vous l'avait dit !"

Aussi les tribuns de la plèbe interrogent-ils Tempanius :
– Dis-nous, ô héros brave et courageux et classe, que penses-tu de ton chef le (bouh-pas-bien-vas-y-crache-dessus) consul Sempronius ?

Et les tribuns de poser toutes sortes de questions amenant sur la personne du consul des remarques désobligeantes.

Mais Tempanius, il joue collectif. Il dit pas de mal du coach.
– Vous savez moi je suis moi et le coach il est coach, c'est pas moi qui vais juger le coach, la dernière fois que je l'ai vu il faisait bien son job de coach, répond Tempanius en substance.

Les tribuns ruminent, Tite-Live applaudit ce soldat fidèle , et les menées juridiques des tribuns restent limitées.

Cependant, et ce bien que Sempronius soit arrivé à ramener à bon port sa partie de l'armée, il est dès la fin de son mandat remplacé par des tribuns MPC et menacé d'un procès par un tribun de la plèbe, qui ne renonce que parce que ses collègues font pression.
Car la plèbe a d'autres combats à mener.
On est en 421 et le sénat s'avise qu'il serait bon de créer deux nouveaux postes de questeurs.

– De nouveaux magistrats ? Ce sera des plébéiens, des plébéiens ! bondissent les tribuns de la plèbe.

Réaction très mesurée des consuls et sénateurs :
– ⁉️😱😡⛔🚫❌
– Si c'est comme ça on fait que vous embêter et on empêche le sénat de se réunir ! font les tribuns.
– Bon OK on dit qu'on élit les questeurs comme les tribuns MPC, concèdent les patriciens.
–Du coup on augmente le nombre de questeurs ?
– Ah non, on n'augmente plus le nombre de questeurs.
– Si c'est comme ça on dépose une loi pour augmenter le nombre de questeurs !
– Hé !
– Et une loi de partage des terres !
– HÉÉ !

Le contexte est tellement tendu que les élections partent en cacahuètes, le sénat peut même pas se réunir pour décider s'il y a consuls ou tribuns MPC cette année, et on doit nommer des interrois (des sénateurs qui assurent l'intérim à tour de rôle). L'un d'eux, voyant l'état chaotique de Rome, fait : "On pourrait négocier ? pasque si on se prend une guerre dans ces conditions, je vous dis pas le boxon", et obtient l'élection 1/de tribuns MPC cette année, 2/ de 4 questeurs sur le même principe.

Les élections se tiennent. Cette fois, la plèbe peut envoyer l'un des siens à 10 (6 tribuns MPC + 4 questeurs) postes de magistrats. On fourbit les candidatures. Les familles les plus aisées et prestigieuses de la plèbe s'alignent, surtout pour la questure.

Et à ces 10 postes ne sont élus... que des patriciens.

– Pourquoi les gens votent pas pour nouuuuus ? chialent les tribuns de la plèbe avec le même trémolo qu'un congrès de la gauche.

Et ils accusent de fraude l'organisateur des élections.

Et justement, qui les présidait ? Aulus Sempronius tribun MPC, cousin du consul Caius Sempronius sèchement battu par les Volsci quelques pouets plus haut.

Là, c'est trop. Puisqu'un cousin est naze à la baston et que l'autre cousin triche aux élections, les tribuns de la plèbe vont se payer un Sempronius.
Ils assignent Caius Sempronius en justice, et Sempronius se fait condamner à 15 000 as de bronze d'amende, ce qui est en euros actuels l'équivalent de masse de pépettes.

En tout cas, Rome semble un peu lassée des consuls, car de 420 à 414, elle ne porte plus à sa tête que des tribuns MPC. Tous patriciens. Même si Tite-Live tend à beaucoup moins héroïser ceux-ci que les consuls, les tribuns semblent fort bien gérer une petite guerre de 419-418 contre les Aequi alliés à la ville de Labici, même s'il leur faut un dictateur en 418 (que Tite-Live héroïse, lui).

Cette guerre apporte de nouvelles conquêtes à Rome, et cela donne une idée à deux tribuns de la plèbe.

– Tu penses comme moi, Spurius Maecilius ?
– Ca dépend à quoi tu penses, Marcus Metilius.
– Allez, je commence. Je pense que chaque fois que Rome...
– ... conquiert ou a conquis des terres...
– ... il faudrait les partager en lots...
– ... attribués à chaque individu romain !
– Tu vois, on pense pareil ! Allez, portons ce projet de loi !
– Je ne vois pas comment il pourrait mal tourner !

Réaction très saine et mesurée des patriciens : 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱 😱

Car oui, les patriciens (et Tite-Live) comprennent que puisque le territoire de Rome a toujours été conquis, *toutes* les terres qu'ils occupent (pas toujours légalement) leur seront enlevées dans une grande redistribution générale et joyeusement collectiviste.

Et alors on se prépare à un déchaînement de diatribes sur le péril woke de ces communistes gaucho-utopistes anarchistes séparatistes éotremoenistes, quand se lève un homme. Appius Claudius le jeune.

– Bonjour, je suis le petit Appius Claudius, arrière-petit-fils d'Appius Claudius le décemvir, et dans ma famille, on fait chier les plébéiens depuis 504 av. J.-C. Juste pour dire qu'on pourrait soudoyer un autre des tribuns de la plèbe pour qu'il s'oppose à ses collègues. C'est nous, les Claudii, qui avons inventé la technique vers 480.
– Ah, jeune Claudius, tu es un vrai Claudius ! le félicite un sénateur, tu n'as pas dégénéré de l'esprit sournois et réac à la fois de tes ancêtres !

Du coup, à force d'invitations, de festins, de cajoleries, de compliments sur leur pull à col roulé en cachemire, les sénateurs se concilient six des dix tribuns de la plèbe. Le jour venu, quand Maecilius et Metelius veulent déposer leur projet de loi, leurs 6 collègues se dressent et s'y opposent. Maecilius et Metelius n'ont plus qu'à se retirer en les traitant de social-traîtres.

Après une année 414 sans guerre ni polémiques recensées (ça arrive), les Aequi reviennent attaquer en 413.

Rome et les Aequi se disputent notamment la cité de Bolae, une ville latine prise par les Aequi, reprise par les Romains, rereprise par les Aequi. "Pfou, y sont relou", soupire le sénat romain, et il envoie taper les Aequi l'un des tribuns MPC du moment, Marcus Postumius Regillensis.

Pour vous donner une idée de la personnalité de Postumius, prenez l'arrogance de Macron, l'autoritarisme de Retailleau, la bêtise bornée de Bardella et le sans-gêne de Darmanin, et vous aurez un Postumius.

CW allusion à des viols

Postumius amène l'armée romaine à Bolae et donne l'assaut à la ville.
– Prenez la cité, mes braves, et vous pourrez vous enrichir pendant le pillage !
– Wéééééééé ! font les Romains, et ils prennent la ville.
– Holà, entrez doucement dans la cité, finalement on la pille pas, JE prends ses richesses et JE les vends pour enrichir le trésor public.
– Héééééééé ! font les Romains.

Pauvres soldats romains. Privés de pilleries, vols et viols. Ils sont tristes. Et énervés.

Mais surtout, à Rome, Postumius commet un impair.
La conquête de Bolae a rapporté de nouvelles terres. Les tribuns de la plèbe, comme c'est leur éternelle revendication, proposent une loi de partage des terres et l'envoi de colons à Bolae. L'assemblée du peuple est en train d'écouter la harangue d'un tribun à ce sujet, qui dit : "Les soldats conquérants de Bolae pourraient récupérer les terres de Bolae", quand Postumius lâche en public :
– Si un de mes hommes bouge, je l'envoie à la bastonnade.

– À la bastonnade ? A LA BASTONNADE ? Comme à un esclave ? Hé, mais, il nous prend pour qui le mec ? réagissent les soldats de Postumius.
– Vous voyez le genre de type élu tribun MPC ? Vous voyez ce qui arrive quand on vote pas pour nous ? rebondit un tribun de la plèbe.
Même les sénateurs trouvent que Postumius abuse.

Alors, quand la rumeur de cet échange atteint l'armée de Postumius, les hommes se mutinent. Postumius essaie de maîtriser l'émeute en punissant de mort à droite et à gauche.

CW meurtre collectif raconté avec beaucoup de désinvolture

Postumius lance Sanctions cruelles et exagérées !

Ce n'est pas très efficace !

Postumius lance Je lâche mes licteurs sur l'armée !

Ce n'est pas du tout efficace !

L'armée lance Lapidation !

C'est très très très efficace !

En effet, ayant déchaîné son armée et par ses paroles antidémocratiques et par son refus de la laisser se remplir les poches, Postumius se vit lapidé par sa propre armée.

A Rome, la nouvelle émut quelque peu.

@hist_myth L'année 414, les guerres et polémiques sont introuvables. C'est bête, à dix ans près c'était le bon nombre.

(Oui, c'est une blague d'informaticien, désolé.)

C'était la première fois qu'un magistrat suprême était ainsi tué par ses subordonnés dans l'exercice de ses fonctions.

Les autres tribuns MPC lancèrent aussitôt une enquête pour identifier et faire juger les coupables.

– Hum, en fait, non, firent les tribuns de la plèbe, et ils mirent leur veto.

Les sénateurs étaient cependant bien embêtés. Vu l'ambiance électrique de la plèbe, les futures élections de tribuns MPC allaient porter des plébéiens au pouvoir, c'était obligé.

re: CW meurtre collectif raconté avec beaucoup de désinvolture

@hist_myth Donc, résumons :

Pour vous donner une idée de la personnalité de Postumius, prenez l'arrogance de Macron, l'autoritarisme de Retailleau, la naïveté bornée de Bardella et le sans-gêne de Darmanin, et vous aurez un Postumius.

Postumius se vit lapidé par sa propre armée.

Y a quelque chose d'inspirant, dans cette histoire, mais je ne suis pas sûr de mettre le doigt dessus.

On se disputa donc pour savoir s'il fallait élire des consuls ou des tribuns MPC, et après un bras de fer, les sénateurs imposèrent un retour des consuls, pendant 5 ans, après 6 ans de tribunat. Cela ne calma guère la plèbe, furieuse car l'enquête sur le meurtre de Postumius fut relancer, et que les terres de Bolae se firent accaparer par les patriciens, comme les autres.

Le mécontentement dut grandir au fil des ans et des guerres contre les Volsci et Aequi, car en 409...

... enfin, en 409, poussée par trois frères tribuns de la plèbe, les Icilii, les plébéiens élurent parmi les quatre questeurs trois plébéiens.

Incroyable. Le plafond de verre est percé.
Les patriciens sont furax et déclarent hautement que si on ne peut plus les faire élire c'est pas la peine de faire des gosses. (Mon facepalm doit se répercuter jusqu'au fond cosmique diffus.)

Du coup, puisque la plèbe ose enfin élire les siens...
... est-ce qu'on va élire des tribuns MPC ?

Mais les consuls regardent ailleurs et sifflotent très fort, et tout semble indiquer qu'on élira des consuls forcément patriciens, quand... les pillages des Volsci et Aequi reprennent, et le consul a besoin de recruter une armée.

– Jamais nous vivants ! s'écrient les Icilii, ou alors pas sans élection de tribuns plutôt que de consuls ! Laisse gagner la plèbe !
– Allez crever ! font les consuls.
– Poum poum poum 🎵 nous on prend la ville de Carventum et on massacre sa garnison, font les Aequi.

–C'est votre faute ! Votre fauuuuute ! clament les consuls aux tribuns.
–Fais des élections de tribuns MPC cette année ou tu recruteras jamais ton armée ! répliquent les Icilii.
– Bon ! OK ! Je me rends ! Mais à une condition ! Vous les Icilii, vous vous représentez pas comme tribuns de la plèbe, deal ?
– Deal !

Sur ce, les tribuns de la plèbe lèvent leur opposition, et les consuls recrutent une armée, fessent les Aequi et Volsci et rentrent organiser les élections.

On organise donc les grandes élections de tribuns militaires à pouvoir consulaire de 408, dans des conditions politiques hyperfavorables aux candidats plébéiens. Sauf que, pendant la campagne :

– Bonjour, je suis Caius Serieusus Candidatus, plébéien qui se présente au poste de tribun MPC...
– ChUt l'écoutez pas écoutez-moi bjour moi chuis Groneunus Corrompus beurp prout, et chuis PLEBEIEN ! et je me PRESENTE ! Hips ! Les PLEBEIENS sont tous comme MOI beuuuuuarp ! Votez plébéien !

Bref, pendant la campagne, les patriciens (aux dires de leurs adversaires) envoyaient des clients à eux se présenter comme candidats en donnant une image déplorable de la plèbe et en volant des votes aux candidats sérieux.

Aussi les élections de 408 ne donnèrent le pouvoir... qu'à des patriciens.

– Mais pourquoi les gens votent pas pour nouhouhous ? sanglotèrent les tribuns de la plèbe à la manière de l'équipe de campagne d'Hidalgo 2022.

re: CW meurtre collectif raconté avec beaucoup de désinvolture

@elzen mouais, enfin, les motivations de l'armée romaine ne sont pas très altruistes

Passons rapidement sur une petite campagne militaire contre les Volsci et Aequi menée non par les tribuns MPC de l'année, qui se chamaillaient trop, mais par un dictateur, et filons en 406.
Cette année-là, le sénat eut une idée brillamment tordue pour couper l'herbe sous le pied aux tribuns de la plèbe.
Exhumant ce qui avait été une revendication d'un tribun de la plèbe en 424, le sénat proposa... de payer un salaire aux soldats.

Là, le sénat, comme s'il avait trouvé l'idée tout seul, déclare que dorénavant il versera une solde aux soldats (d'où le nom).

La plèbe est en joie, en délire, en extase.
– Vous êtes vraiment les Pères de la patrie, pleurent de joie les plébéiens à l'idée de toute cette thunasse.
Les tribuns de la plèbe grognent qu'il y a un loup, que l'argent viendrait sûrement d'un impôt sur la plèbe, ou autre coup fourré.

Et, en effet, les sénateurs lancèrent un nouvel impôt.

– Haha on le savait ! déclarent les tribuns, eh bien si vous décidez de ne pas payer l'impôt, on vous protègera des poursuites !

(Balkany voterait tellement tribuns de la plèbe.)

Mais, d'une part, les patriciens firent les bons élèves en payant l'impôt rubis sur l'ongle, suscitant une forme d'émulation chez les plébéiens très aisés des classes supérieures (plébéiens ≠ pauvres !), et chacun voulant exhiber à son tour ses signes extérieurs de richesse, l'impôt fut vite levé partout.

– Pourquoi les gens nous écoutent pas nouuuus ? gémissaient les tribuns de la plèbe comme je prédis que le ferait une future équipe de campagne Glucksmann 2027.

Enfin, le livre IV se ferme sur un début d'hostilités avec la cité étrusque de Veii, la voisine terrible et agaçante de Rome.

Étrusques et Romains vont-ils se fritter ?
D'autres peuples, comme les mystérieux Samnites, se manifesteront-ils ?
Et n'est-ce pas, au loin... les Gaugau, les Gaugau, les Gaulois ?

À suivre dans le livre V !

Merci à toutes et tous pour la lecture !

@hist_myth Les riches qui payent l'impôt pour donner l'exemple.

On sent comme un changement d'époque.
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@hist_myth
Le pillage n'est pas intéressant d'un point de vue capitalistique, il détruit l'appareil productif détruit. Financer la guerre comme un investissement (risqué, certes) est plus intéressants.

En gros, mieux vaux donner 1 as à tes sbires sans assurance de victoire et être sur de récupérer 2 as par an en cas de victoire.

Salauds mais malins ces bourgeois, c'est pour cela qu'ils sont vils.

@Nanard_Groubiche Je sais pas si ça marche comme ça dans l'Antiquité romaine : l'économie est essentiellement agricole, très peu industrielle/artisanale surtout à époque archaïque, donc il n'y a pas d'intérêt à détruire par exemple l'appareil productif de biens ; en revanche il y a un intérêt très net et très visible à s'emparer de terres ; c'est vraiment la base de la pensée économique antique : terre = richesse.

@elzen Ils payent l'impôt parce qu'ils y gagnent une armée plus fidèle qui ira conquérir des terres pour eux (et leur procurer ainsi des revenus pérennes)

@hist_myth
Ouais mais bon, je ne pense pas qu'ils ont limité le recours au pillage (avec son cortège de viols, meurtres et famines) par souci humanitaire.

La rémunération des soldats est utile dans le cas d'une armée de métier (mais ils n'en sont pas encore là) ou si les ressources économiques sont suffisantes pour cela. Si les romains ont de la thune, c'est qu'ils font des bénéfs.

Et dans une économie artisanale, l'appareil productif c'est les gens, lesquels fonctionnent moins bien quand ils meurent éventrés après avoir voulu protégé leur fille.

@Nanard_Groubiche Ah mais les Romains continueront de piller, hein. Largement.
Soit du pillage individuel soit le pillage organisé pour revente ensuite au bénéfice du trésor public.

Non, la solde ne remplace pas le pillage, elle vient comme une sorte d'indemnité. Tite-Live semble dire que les patriciens s'achètent ainsi la tranquillité sur le plan politique. C'est peut-être aussi que les patriciens et les plus riches des plébéiens deviennent dans les faits bien plus proches socialement.

@Nanard_Groubiche
Aussi, je n'ai pas dit que Rome était une économie artisanale mais *agricole*, c'est très différent. L'artisanat est bien sûr présent mais ma base de l'économie n'est pas la production d'objets mais de blé/laine/huile/vin. Et d'ailleurs le pillage c'est aussi la capture et l'asservissement des prisonniers de guerre, donc se procurer une main d'œuvre gratuite via des esclaves.

Le pillage va subsister très longtemps, il se pratique encore en 1571 à la bataille de Lépante...

@hist_myth Bordel mais tu trouves où tous ces noms???
Même Pascal Praud rallonge pas autant ses pseudos insultes!

@xalofar J'ai passé beaucoup, beaucoup de temps sur Internet.
J'ai assez vite compris que tu pouvais insulter n'importe qui en prenant le nom d'une valeur jugée belle et juste et en ajoutant "iste".

@hist_myth

Tiens, d'ailleurs, ça fait de bons esclaves, les prisonniers de guerre pris au combat ?
Ou bien c'est surtout les civils qui sont mis en esclavage ?

@Nanard_Groubiche

@lienrag @Nanard_Groubiche A vérifier. Il y a trois sources d'esclaves : les prisonniers de guerre, les esclaves fils d'esclaves, et les personnes nées libres asservies pour des raisons "économiques" : esclavage pour dettes, enfants vendus/abandonnés par leurs parents...

Il me semble que les esclaves sont d'abord et majoritairement des prisonniers de guerre, mais dans les faits, il y a probablement une part non négligeable d'esclaves nés d'esclaves.

@lienrag D'où l'importance symbolique de l'affranchissement à Rome (l'affranchi n'est plus esclave mais surtout ses enfants sont citoyens romains).

Ce qui rendait la société romaine beaucoup moins étanche que la société athénienne et surtout spartiate (dont le rapport hommes libres/esclaves est démentiel).

@hist_myth

Comment ça se passe, le mélange entre l'honneur apparemment important (les mecs font un accord avec leurs ennemis politique sur un sujet majeur en n'ayant que la parole donnée comme garantie) et l'ambiance de magouilles permanentes que tu décris ?

@lienrag Faut penser que 1/ on est dans une société prétechnologique, si foule très pas contente, pouvoir pas avoir moyen bombarder gens pas contents, donc foule doit rester contente 2/ toute la politique romaine est empreinte de religion, et les gens croient à leur religion, donc la parole donnée ne s'enfreint pas comme ça, pas en public, pas sans bonne excuse à fournir aux hommes et aux dieux ;)

@hist_myth

Sempromius a été tué ?
Quand ça ?

@lienrag Postumius*

@hist_myth

Oui mais la question c'est si les prisonniers de guerre ce sont vraiment majoritairement des ex-combattants ou si c'est un euphémisme pour dire "les civils qui traînaient dans le coin".

J'ai cru comprendre qu'en Gaule ça avait été largement la deuxième catégorie lors du passage du Jules.

@lienrag Les deux... mais sûrement beaucoup de civils lors des prises de cité