§ Posté le 28/01/2013 à 20h 02m 51
Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes,
Ni l'orgue, ni la prière aux agonisants…
Onze ans déjà, que cela passe vite, onze ans…
Vous vous étiez servi simplement de vos armes,
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans…
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes,
Noirs de barbe et de nuit, hirsutes, menaçants,
L'affiche, qui semblait une tache de sang,
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants…
Nul ne semblait vous voir français de préférence,
Les gens allaient, sans yeux pour vous le jour durant…
Mais, à l'heure du couvre-feu, des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos « Morts pour la France »,
Et les mornes matins en étaient différents…
Tout avait la couleur uniforme du givre,
À la fin février, pour vos derniers moments,
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement :
« Bonheur à tous, bonheur à ceux qui vont survivre,
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand.
Adieu la peine et le plaisir, adieu les roses,
Adieu la vie, adieu la lumière et le vent…
Marie-toi, sois heureuse, et pense à moi souvent,
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses,
Quand tout sera fini, plus tard, en Erivan…
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline,
Que la nature est belle, et que le cœur me fend !
La justice viendra sur nos pas triomphants !
Ma Mélinée, ô mon amour, mon orpheline,
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant… »
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent,
Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps,
Vingt et trois étrangers, et nos frères pourtant,
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir,
Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant…