§ Posté le 16/03/2012 à 15h 34m 27
Un petit article pour faire un peu le tri dans les noms (et une petite incursion du monde informatique dans ma section langage et discussion).
On entend souvent parler, dans les médias, de « hackers » pour désigner les pirates informatiques de toute sorte. Je me suis déjà exprimé sur le sujet au détour de quelques articles ; autant le faire une bonne fois par un article plus ou moins dédié. Un Hacker, ce n'est pas un pirate. Le terme a été inventé, à l'origine, par une communauté de bidouilleurs informatiques pour se désigner eux-mêmes.
Il s'agit d'un terme honorifique, que les Hackers initiaux accordent aux gens ayant fait preuve d'un talent conséquent. Pas nécessairement en informatique, d'ailleurs, même si c'est dans ce domaine qu'on l'utilise le plus souvent.
Certains objecteront que les « pirates » informatiques (on parle de crackers, plutôt, parce qu'ils n'ont pas grand chose à voir avec les gens qui pillent les bateaux) font preuve d'un grand talent en informatique. C'est faux. La plupart des actions qu'effectuent ces gens ne demande aucune connaissance particulière, mais simplement l'utilisation de logiciels automatisés qu'ils n'ont même pas conçus eux-mêmes.
Rien de plus simple, en fait, que d'effectuer une attaque par déni de service (« DoS ». En gros, demander tellement d'infos à la fois à un serveur qu'il finit par craquer et ne plus répondre à rien), pour peu qu'on se lance dans quelques recherches rapides pour trouver les outils, et ceux qui se livrent à ce genre d'activité ne démontrent aucun talent, mais juste un manque flagrant d'intelligence.
Et puis surtout, le terme Hacker est empreint d'une certaine idéologie, qu'un cracker, même particulièrement plus doué que la moyenne, ne partage pas. Les Hackers sont des gens qui construisent des choses, quand les crackers détruisent. Et détruire est toujours beaucoup plus facile. Les Hackers sont attachés à une certaine idée de liberté qui est simplement à l'anti-thèse des actions que les crackers effectuent.
Il y a quelqu'un qui vous expliquera certainement ce que c'est qu'un Hacker mieux que moi, parce que lui en est un. Il s'appelle Eric S. Raymond, et c'est une des figures emblématiques du mouvement de l'informatique Open Source. Il a écrit un excellent article sur le sujet, publié ici. Pour ceux qui ne comprennent pas très bien l'anglais, de nombreuses traductions sont disponibles sur le web. Genre ici, par exemple.
Je ne partage pas l'idéologie des Hackers sur un bon nombre de plans. En particulier, étant comme vous le savez très attaché au monde de l'éducation, je ne suis pas un fan inconditionnel de l'autodidactie. Je ne reprocherai jamais à quelqu'un d'apprendre par lui-même, au contraire, mais lui refuser des explications sous prétexte qu'il pourrait apprendre tout seul me semble être une aberration.
Je ne suis donc pas un Hacker, et je n'aspire pas à en devenir un. Je suis un modeste bidouilleur à ma propre échelle, et ça me suffit. Cependant, je me sentirai toujours infiniment plus proche, sentimentalement parlant, des hackers que des crackers, et même sans ça, je n'apprécie pas particulièrement qu'une bande de nuisibles s'accaparent un terme qui a pourtant une dimension certaine.
Alors je répète : les hackers ne sont pas des pirates, et les crackers ne sont pas des hackers.
Ensuite, on parle beaucoup, en ce moment, du mouvement des Anonymous.
Un mouvement assez populaire, au point qu'ils se retrouvent confrontés eux aussi aux gens qui revendiquent leurs noms sans appliquer leurs principes. Au point qu'un Anonymous a jugé récemment nécessaire de publier un communiqué pour rappeler que la base de ce mouvement, c'est l'anonymat, et que ceux qui réagissent « au nom d'Anonymous » tout en laissant leurs coordonnées personnelles facilement accessibles sont peut-être un peu à côté de la plaque.
Il y a de ça, en effet, et quoique je ne prône pas l'anonymat absolu (je partage, à ce sujet, l'avis que Maître Eolas a développé ici, là, puis encore là), je ne peux que recommander à ces gens de faire un peu plus attentions à leurs informations privées.
Pour autant, le cas des Anonymous n'est pas comparable à celui des Hackers, parce que les Anonymous sont… disons… relativement peu cohérents avec eux-mêmes. Ils disent lutter pour la liberté d'expression, et pourtant leurs armes principales sont ces attaques par déni de service dont je parlais plus haut. Des attaques qui n'ont pour seul effet que de fermer le débat en rendant inaccessibles les propos de leurs interlocuteurs. La liberté d'expression par la censure, c'est toujours magnifique, non ?
Une autre de leurs armes favorites est la délation. On les a ainsi vu, récemment, accéder frauduleusement aux informations confidentielles de certaines personnes aux idéologies douteuses pour les publier (voir par exemple ici). Pour des personnes revendiquant ainsi leur propre anonymat, c'est un comportement, disons… curieux, que de le refuser aux gens qui ne partagent pas leurs idées.
Je n'ai donc pas grande estime envers ces gens (et nul doute que le dire ainsi publiquement me vaudrait probablement une DoS si mon site était un peu plus connu, mais plus efficace encore que l'anonymat, il y a mon absence totale de notoriété ^^"). Ils ont de bonnes idées et de bonnes positions sur pas mal de point, mais gagneraient à faire progresser leurs idées par des moyens moins discutables.
Voilà, maintenant cet article n'était pas là pour poser des avis définitifs, et je ne demande qu'à ce que ceux qui ne sont pas d'accord de s'exprimer (et les autres aussi, d'ailleurs ^^ Débattons un peu, si vous le voulez bien).